À propos de ce livre électronique
Adam, capitaine de police fraîchement promu, est happé dans une enquête complexe, où les fantômes du passé vont se réveiller.
Le seul témoin se retrouve dans le coma après un accident de voiture. Cet homme porte en lui des secrets enfouis depuis son enfance. Détient-il une des clefs de l’affaire ?
Parallèlement, une jeune fille est harcelée en ligne après un chantage pervers.
Qu’est-ce que la décapité du marais et cette jeune femme peuvent avoir en commun ?
Entre réalité et fiction, vous explorerez les profondeurs insondables et terrifiantes de l'âme humaine.
Un thriller haletant où chaque page vous rapproche de la vérité, où chaque révélation vous tient en haleine, où le suspense est omniprésent.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Ingénieur de formation et cadre dans l’informatique, Samuel HURTREL a trouvé son équilibre dans l’écriture qui l’inspire depuis son adolescence. Après avoir édité un recueil de poésie, un roman d’amour aux couleurs sombres, il s’est laissé porter par la dynamique des thrillers engagés autour de sujets brûlants d’actualité.
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Aperçu du livre
Diaphragme - Samuel Hurtrel
1
Elle le regardait, les yeux remplis d’effroi.
Son esprit s’était figé. Elle n’arrivait plus à se souvenir. Elle n’arrivait plus à imaginer. Le peu de force qui lui restait s’était mobilisé dans l’éternité de cet instant.
Elle était nue. Il avait lié ses mains par-derrière. Et la corde qui lui tenait le cou était attachée sur la panne faîtière de la charpente de l’observatoire. Ici, des milliers de passionnés étaient venus, des heures et des heures durant, voire des jours et des nuits, pour saisir l’envol d’un canard, la déambulation d’une poule d’eau.
La boule du bâillon sadomasochiste empêchait sa gorge d’émettre le moindre son. Et ses râles ne risquaient en rien de déranger la quiétude de ces petits villages sis de l’autre côté de l’Essonne.
Il l’avait fouettée. La peau de ses fesses et de son dos était lézardée et perlait des gouttes de sang. Malgré la douceur de cette fin de jour, elle avait froid. Très froid.
Il prenait tout son temps, comme s’il ne craignait rien. À cette heure, en cet endroit, qui aurait pu les surprendre ?
Pourquoi était-elle venue à ce rendez-vous ? Pour l’argent ? L’argent, ce leurre qui vous fait croire à la possibilité d’un bonheur. Mais, là, maintenant, tout l’or du monde ne valait plus rien.
Elle allait mourir à 20 ans.
Il l’avait empoignée par le cou, compressant son épiglotte. Il la faisait souffrir. Dans ses yeux se reflétait le plaisir sadique du prédateur. Il jouissait de sa terreur. Et c’est ce rictus qu’elle emporterait au paradis.
Une fulgurance l’extirpa de sa torpeur. C’était dans un film qu’elle avait vu il y a plusieurs années. L’héroïne se libérait en frappant son agresseur d’un coup de genou entre les cuisses. En désespoir de cause, la jeune femme essaya. Mais cet homme avait les réflexes rapides. D’une main, il l’en empêcha. Elle sentit sa poigne de fer sur sa cuisse. Et l’humeur de son haleine lui donna un haut-le-cœur.
Il décrocha la corde et l’empoigna par les cheveux.
Elle tomba en bas de l’escalier.
Il l’obligeait à marcher derrière lui, tirant sur le lien jusqu’à l’étrangler.
Elle tituba et se releva. Ses pieds nus marchaient dans la glaise. Les joncs lui griffaient la peau. Des débris d’écorces lui perçaient la plante des pieds.
Des hétérocères voletaient en faisant jouer leurs ailes comme des miroirs.
Il ne lui restait plus que quelques minutes à vivre.
La lune gibbeuse brillerait dans quelques jours d’un plein éclat.
Tous les projets qu’elle avait imaginés n’avaient plus de sens. Se laisser bercer par la magie du cap Nord et contempler le soleil de minuit. Connaître la sensation du Nouveau Monde et voir la couronne de la statue de la Liberté. Ressentir l’histoire des hommes en longeant la douve d’Angkor Vat. Se marier un jour et avoir des enfants. Au moins deux, un garçon et une fille et voir sa mère les prendre dans ses bras. Être heureuse tout simplement.
Elle entendait des bestioles grogner dans les hautes herbes.
La mort avait maintenant un nom : lui, cet homme, qui lui était étranger.
Alors, elle récita la prière du cœur, celle que le pope déclame sur le mont Athos : « Seigneur Jésus-Christ, fils de Dieu, aie pitié de moi, pauvre pécheresse. »
2
Gabriel avait mis l’autoradio de sa guimbarde à fond. C’était comme ça tous les matins, ça l’aidait à se réveiller. Il adorait ces journées où le soleil se levait tôt. Et, en ce dimanche 24 mai de l’année 2020, il savourait le plaisir de revivre, après tous ces mois d’enfermement, de privation, d’interdits et de confinement. Un tube des années soixante passait sur radio Nostalgie, une chanson de Pierre Perret : Les Jolies Colonies de vacances.
Gabriel adorait cet air joyeux, respirant l’humour et la bonne humeur. Il avait bloqué la glace de sa portière avant à l’aide de l’entrebâilleur et chantait à tue-tête :
« Les jolies colonies de vacances
Merci maman, merci papa. »
La météo prévoyait du beau temps, une température comprise entre vingt et vingt-quatre degrés en Île-de-France. Il y avait eu quelques gouttes, à peine de quoi mouiller un chat. C’était une belle journée pour œuvrer dans le marais.
Aux infos, ils passaient du coq à l’âne, tentant de percer le mystère de la fuite de Carlos Ghosn, de comprendre comment une mère, habitant dans l’Aude, avait pu rester durant deux mois devant le cadavre de sa fille en décomposition et l’annonce qu’avait faite le Premier ministre Édouard Philippe sur le report des élections municipales. Gabriel, ça lui cassait les pieds, la politique et toutes ces news à faire déprimer un quokka¹.
Entre Ballancourt-sur-Essonne et Fontenay-le-Vicomte, la D191 était calme à cette heure de la journée. Gabriel roulait, guilleret, repensant à la nuit qu’il avait passée avec Marie, son amie, et bien plus encore.
Gardien du marais. Il avait pris la relève de son père parti trop tôt rejoindre le jardin des délices. C’était un métier qui lui allait bien. Surveiller le lieu. Prendre soin des roselières. Mesurer l’impact du changement climatique sur la faune et la flore. Recevoir des associations de passionnés et leur faire découvrir les charmes méconnus du Hurepoix. Dès son enfance, il avait été proche de la nature. Ici, il se sentait bien, loin du tohu-bohu parisien dont il ne connaissait que la tour Eiffel, pour n’y être allé qu’une fois dans sa vie. Ça en étonnait plus d’un. N’être qu’à quarante kilomètres de la capitale et ne pas avoir envie d’aller faire du lèche-vitrines, de visiter quelques musées, d’aller dépenser de l’argent dans les gargotes de Batignolles. Quand d’aucuns lui posaient la question, Gabriel riait. « Aller m’agglutiner dans le métro ? M’enfumer sur le périphérique ? Non merci. Très peu pour moi. Je préfère rester auprès de mes bécasses ! » Voilà, tout était dit. Et ses meilleurs amis ne cherchaient plus à le convaincre que la vie était meilleure ailleurs que chez lui. À vouloir trouver trop d’arguments, ils en auraient perdu leur assurance.
Demain, le garde recevait un groupe de gosses. Des mômes qui n’avaient qu’une seule envie, après avoir été empêchés de prendre l’air durant des mois, celle de reconnaître les empreintes des carnassiers, de distinguer les chants d’oiseaux, de contribuer à l’herbier de leur classe.
Gabriel en était sûr. Tout ce tralala médiatique autour d’une grippe consistait à reprendre la main sur un peuple un peu trop gaulois. Et, quelle que fût la république en place, tous les États, autant qu’ils étaient, avaient choisi « l’autocratie démocratique » comme voie de salut. Et notre belle France n’y avait pas dérogé, courbant l’échine sans mot dire sous le joug de l’impératif de cause majeure.
Gabriel était heureux de cette belle journée.
Il gara sa deux-chevaux au Court Fétu. Une six cent deux centimètres cubes de vingt-neuf chevaux. Une rareté ! Le seul héritage de son père. Un tacot qu’il avait retapé avec des pièces d’origine. Il en restait fier. Ayant refait les joints de culasse, l’échappement, la boîte de vitesses et l’intérieur ! Toutes ses économies y étaient passées ! Le jeune homme entra par l’étang aux Pointes. Il n’avait pas loin pour se rendre à l’observatoire des Moines où, s’asseyant sur le ponton, il laisserait passer une heure, le temps d’un casse-croûte. Hier, Gabriel était allé vers l’Île rouge, déambulant dans ce labyrinthe aquatique d’étangs et de chenaux. Aujourd’hui, son programme l’emmenait de ce côté-là du marais.
Qu’y avait-il de mieux sur terre que ce petit paradis ?
Il avait repéré une laie qui charriait des herbes et des branches. Certainement pour consolider le chaudron protégeant ses petits. Connaissant parfaitement les mœurs de ces animaux, ce passionné de la nature avait suivi leurs traces jusqu’à percevoir les grognements de la mère et les couinements des marcassins. Ils étaient là, à quelques dizaines de pas, derrière.
Les approcher au plus près. Tel un chasseur d’images. Son cœur palpitait. Il ne fallait pas les effrayer. Les porcelets se tenaient là, entre des aulnes glutineux et des frênes élevés, cachés par des touffes de polystic à bords roulés. C’était ce genre d’instant que Gabriel adorait. Ici, les animaux vivaient en liberté et l’homme n’était qu’un invité. C’était à lui de se conduire avec la correction qui sied aux personnes ayant du savoir-vivre. Mètre après mètre, il avançait. Il voyait leurs oreilles. Il avait compté six petits. La femelle devait être âgée.
Le garde avait levé la tête, au risque de se faire charger par la mère.
Et il avait été saisi d’effroi.
3
Marais de Misery, après-midi du dimanche 24 mai 2020
Georges, un vieux de la vielle, le regardait, en ricanant.
Ah, ah. Mirez-moi ce bleu-bite ! Ça fait de grandes écoles et ça tourne de l’œil au premier sourire de la camarde !
Il souleva le plastique qui recouvrait la tête mutilée d’une jeune femme.
Julien n’était là que depuis trois semaines. Bombardé ASPTS³ à l’issue de sa formation, il avait choisi d’aller sur le terrain plutôt que d’être le valet de service dans le bureau cossu d’un ministère. Son père qui avait le bras long le lui avait pourtant proposé. Non. Il fallait qu’il se constituât et qu’il se créât. Qu’il s’éloignât du cocon familial. Qu’il se démarquât de la voie toute tracée. Qu’il se distinguât de sa sœur sortie majore de HEC⁴.
C’était un défi qu’il s’était donné, après s’être fait charrier par ses potes d’académie sur ses bonnes manières, l’associant au surgeon de Saint-Amour, illustre androgame du Crépuscule des dieux.
Julien fut pris de spasmes et de nausées. Il s’écarta de ce spectacle en pleurant et vomit sa bile sur un magma de bouillasse et de tourbe.
Rires…
Bogart, le major s’approcha.
L’apprentissage était un passage. Les sarcasmes, une exhortation à se dépasser. L’heure n’était pas à la raillerie de comptoir. Une femme avait été amenée ici, telle une brebis pour le sacrifice. Assassinée sous le rictus de la camarde. Atrocement mutilée. Laissant sa chair sanguinolente à l’humeur des bêtes sauvages.
Georges l’attendait, les bras croisés, tel un taulier. Il méprisait cette maréchaussée de gitons en blouses blanches, obnubilés par la recherche de poils de cul. Rivalisant de préciosité avec leurs gants chirurgicaux et leurs petits sachets autocollants.
Après tout, le bizutage, c’était normal. Cette rencontre première avec l’horreur et l’ignominie. Ce baiser insupportable de la mort vache. Georges, lui, c’était sur le tas qu’il avait tout appris. À son époque, l’école, c’était la rue, le caniveau, le trottoir ! Combien de nuits n’avait-il pas passées à ramasser des filles de joie ? À soudoyer des indics ? À remonter des filières ? À éviter des balles perdues ? La police, la vraie, c’était celle-là, la sienne, et non pas celle de ces guignols travestis en carabins de bas étage.
Julien savait qu’il devait s’approcher. Au risque, sinon, de devoir subir les sarcasmes de ses pairs, qui ne manqueraient pas d’apprendre qu’il n’avait pas été à la hauteur. Bien qu’aucun d’entre eux ne l’eût été la première fois, le pardon ne lui serait pas accordé. Ce monde était dur, sans pitié. L’épreuve initiatique restait le prix à payer pour y entrer. La réception du néophyte dans le corps des compagnons aguerris – ces hommes et ces femmes ayant accepté d’être possédés par le spectre des morts, hurlant leur déraison – ne s’obtenant que dans la goguenardise face à la sauvagerie.
Il respira un grand coup et s’approcha d’un pas ferme. Il était prêt.
Georges souleva le voile, linceul de fortune d’une inconnue.
Julien ne bronchait pas. La cruauté de cette scène anesthésiait son dégoût.
Georges lui tapa sur l’épaule.
Ce soir, des cauchemars viendraient salir son ciel avec la chair, la pourriture, la boue et le sang.
4
Adam venait d’arriver. Tout juste nommé capitaine au SDPJ de Créteil, à la place d’Éva, qui avait pris sa retraite sur les hauteurs de Sainte-Adresse. Une sacrée femme. Une commissaire hors pair. Elle avait été pour lui son mentor et maintenant elle était son amie. Il y pensait, garant sa voiture sur le parking de la chatterie, cette pension pour félins, sise au bout du chemin des marais.
Il était presque 20 heures. La lueur du jour s’attardait, caressant la chaleur de ce jour comme une amante.
Adam marchait d’un bon pas, à travers les herbes folles. Ce lieu lui rappelait les jours buissonniers de son enfance. Là-bas, dans le Morvan, près du lac des Settons.
Trois techniciens en habit blanc s’affairent sur le site ceinturé de rubalises. Ils avaient disposé des cavaliers sur une zone d’une centaine de mètres carrés. Bogart était là. Henri le légiste aussi.
Gabriel était assis sur le tronc pourrissant d’un frêne atteint de chalarose. Le champignon n’avait pas fait de cadeau. Il avait fallu couper toute une futaie. Il était prostré. La tête entre ses mains.
Gabriel releva les yeux.
La chose. Elle n’avait pas de nom. La tête séparée du corps. Comme maudite.
Gabriel sanglotait.
Adam lui prit l’épaule.
Gabriel retrouva sa deux-chevaux. Son lopin de paradis sur terre, c’était fini pour lui. Ce lieu avait été souillé. Le Ciel n’existait plus.
5
Marais de Misery, dimanche 24 mai 2020,
au soir d’une belle journée
Dans la forêt, des animaux manifestaient leur mécontentement. Des canards cancanaient, des chevreuils aboyaient, des fouines couinaient, des sangliers grommelaient, dérangés par la présence des lampes halogènes et le faisceau des gyrophares. Théâtre incongru d’ébats sanguinaires où la mort s’était donnée en spectacle dans le registre macabre de ses œuvres les plus abjectes. L’homme ici n’était pas chez lui.
L’équipe de la police scientifique, anonymisée dans leur combinaison blanche, officiait entre les arbres et les fougères. L’enjeu relevait du défi de l’aiguille dans la botte de foin. Ici, des traces de pas imprimés sur la terre martelée par les phacochères. Là, un morceau d’étoffe accroché aux épines d’un buisson. À terre, des cheveux épars dans les touffes de bryophytes. La lumière blafarde de la lune traversait la vapeur qui suintait du marais de Misery. Près de la fondrière, dans laquelle reposait le corps acéphale avalé par la boue, il y avait une souille. Des sangliers étaient venus s’y vautrer, frottant leur fourrure sur les troncs à proximité pour se débarrasser de leurs parasites. Ils avaient dû flairer la chair pourrissante, se nourrissant de ses joues, de ses lèvres, de ses yeux, de son nez. Ne laissant que le crâne et les cheveux salis dans l’expression d’un tsantza.
Au loin, on percevait les lueurs des communes de Vert-le-Petit et d’Écharcon. Bourgades tranquilles abritant de paisibles demeures. Le drame qui s’était déroulé à deux pas n’avait pas dérangé leurs lares domestiques. La vie, ici, s’écoulait dans la quiétude des eaux stagnantes.
Mais, pourquoi cette tête coupée ? Et
