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À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir
À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir
À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir
Livre électronique227 pages2 heures

À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir

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À propos de ce livre électronique

À dix-sept ans, Alexandre en a assez. Assis au pied d'un arbre, sous la corde qui lui arrachera son dernier souffle, il écrit sa colère, ses peurs, ses espoirs et ses rêves inassouvis.

Son seul refuge, il le trouve dans ces pages qu'il noircit avec la rage impuissante du naufragé. Ni en fuite ni en quête, il dérive, sans ancrage. Il n'attend plus rien, sinon l'instant où tout s'arrêtera.

À force de mots, découvrira-t-il une réponse, même fragile, même incomplète?

Dans ce premier roman, Alain Lessard nous happe au cœur par un récit d'une rare intensité où se bousculent le désir d'exister, d'être entendu, d'aimer et de l'être en retour.
LangueFrançais
ÉditeurLes éditions Pixel d'Étoile
Date de sortie30 avr. 2025
ISBN9782925209508
À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir

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    Aperçu du livre

    À tous ceux qui ont si bien su me laisser mourir - Alain Lessard

    À tous les gens en mal d’amour qui ne savent plus où ils en sont ni si ça en vaut vraiment la peine.

    Que l’humanité vienne à disparaître, elle tuera ses morts pour de bon.

    Jean-Paul Sartre

    Première partie

    Les yeux de l’ombre

    Détachement… Effondrement…

    Sinistre naufrage, existence funeste.

    Espoirs d’une agonie, tragique exil.

    Idéal asséché.

    Âme fissurée désirant quitter sa cage.

    Remous dévastateurs exigeant repos.

    Croire ? Craindre.

    Renonciation… Abandon…

    La tombée de mon propre rideau

    Il fait si froid ici, mais mon esprit bouillonne de tourments. Au travers des branches me parviennent quelques flèches égarées de la lumière argentée de la lune. Le silence n’est troublé que par l’apaisant murmure du grincement de ma corde accrochée à la branche d’un saule depuis longtemps mort et déraciné.

    Déraciné… Ce mot me va si bien. Je suis déraciné de tout. Du temps et de la vie. Des gens qui me regardent avec leur sourire hypocrite et qui me lancent d’insipides commentaires me prouvant à chaque fois à quel point ils sont pourris. Charognes… Tu le sais, Alexandre, qu’on t’aime. C’est ça, oui…

    Toi, au moins, tu me comprends. Depuis que je t’ai vue, traînant sur l’établi de mon père, j’ai su que tu allais m’aider, être ma porte de sortie. Mon exil. J’ai si hâte que tu enlaces mon cou dans un dernier élan vers ma libération. Enfin quitter ce monde et toute cette souffrance qui me colle à la peau et me gruge le cœur.

    Avant d’en finir, je veux écrire ce que j’ai vécu. Tout ce que vous n’avez pas su voir. Je veux que les gens sachent qui j’étais réellement : mes émotions, sentiments, vains espoirs et désespoirs. Ça me fait tout drôle de m’écrire à l’imparfait. Pourtant, en même temps, c’est tellement rassurant…

    Je sais, certains vont dire que je n’étais qu’un lâche. Eh bien, vous avez raison. Vous êtes contents ? Ça vous réconforte ?

    Tant mieux pour vous, car c’est tellement dur de vivre avec des remords, n’est-ce pas ? Allez-y, cachez-vous derrière vos illusions. Si vous saviez à quel point je vous méprise.

    Pourquoi ? Parce que vous n’avez jamais su voir ce qui se cachait derrière mon masque de petit gars parfait et souriant. Parce que vous ne m’avez jamais demandé sincèrement s’il y avait des choses dont j’aurais aimé vous parler. Parce que personne ne m’a jamais serré dans ses bras en me disant que j’étais important. Parce qu’à cause de vous, je me sens comme de la merde, un pauvre bout de bois de grève échoué sur une plage qui ne fait qu’encombrer et n’est plus bon à rien, sinon errer au gré des vents et marées. Et parce que tout. Et parce que rien.

    J’aurais tellement aimé vous dire tout ce que je pense, mais, à quoi bon ? Pour me faire répondre quelque chose du genre : Voyons donc… Alexandre qui ne va pas bien, ça ne se peut pas !. Non merci. Je n’ai aucune envie que l’on banalise ma souffrance qui, pourtant, est bien réelle. Comme si j’en étais immunisé. Désolé de vous l’apprendre, mais personne ne m’a vacciné contre le mal de vivre.

    Je vous imagine déjà à mes funérailles en train de vous consoler avec de belles paroles : Ça ne paraissait pas du tout, Je ne m’attendais tellement pas à ça, surtout pas de lui. Ah oui… Il y aura sûrement un insignifiant qui ne trouvera rien de mieux à dire que : Ils l’ont bien arrangé. Il se ressemble.. Ce que le monde peut être imbécile, parfois !

    Ensuite, vous vous épancherez sur ma tombe pour tenter de comprendre. Vous me rendrez un hommage ridicule avec de grandes lettres larmoyantes ou avec des bouquets de fleurs achetés en vitesse pour vous donner bonne conscience. Qu’en aurai-je à faire que ça sente bon six pieds au-dessus de ma tête ?

    Regardez où j’en suis maintenant. Assis au pied d’un arbre, sous une corde avec un nœud coulant, en train d’écrire tout ce que j’ai sur le cœur avant de me tuer. Et tout cela en espérant qu’au moins quelqu’un ici-bas se rende compte que j’existais. En souhaitant que quelqu’un s’aperçoive qu’il s’est peut-être trompé à mon sujet et que dans le fond, j’étais un être humain comme tout le monde pour qui, quand ça va mal, il est important d’avoir une épaule pour pleurer… au lieu d’une foutue corde pour enfin pouvoir se faire bercer.

    Voilà mon histoire… ma vie… mon cauchemar…

    D’aussi loin que je me souvienne, je me suis toujours senti un peu différent. À la maternelle, lorsqu’il fallait s’asseoir tout le groupe en cercle, je me plaçais environ un mètre en retrait. Je ne me suis jamais senti bien avec les enfants de mon âge. Je me sentais comme un extraterrestre.

    Au primaire, les élèves jouent en groupes, courent partout, crient et rient. Je n’avais qu’un seul vrai ami avec qui je m’amusais toute l’année scolaire pour ensuite ne plus le revoir de l’été. Tout cela sans en ressentir le moindre remords, regret ou tristesse. Au retour en classe, à l’automne, je focalisais sur une nouvelle personne. Et ainsi de suite, chaque année. J’étais une sorte de parasite qui s’accroche un certain temps et qui, hop, saute sur un autre. J’ai l’impression que ces un ami n’étaient que des instruments, un paraître.

    Je n’ai jamais vraiment réussi à être émotionnellement impliqué en amitié. Jamais perdre un ami ne m’a fait un tant soit peu de peine. Dans ma tête, ça sonne bof, passons à autre chose.

    J’ai toujours ressenti le besoin d’écrire. Mes peines et mes rares joies. Écrire pour comprendre ce qui fuit ma raison. Écrire parce que ma plume sait mieux que moi utiliser les mots justes. De la prose afin de cracher en grands déversements ce qui brûle en moi. De la poésie pour embellir tout ce qui est flétri. Avec ma lettre, je vous laisse mon petit carnet rempli de ces misérables petits poèmes qui ont su assoupir certains de mes emportements, mais l’engourdissement des métaphores n’a jamais pu asphyxier le mal qui respire en moi.

    Quand j’observe autour de moi, je vois plein d’amis, d’amants ou d’amoureux qui pleurent après une querelle. Quoi de plus normal, me direz-vous ? Pourtant, quand ça m’arrive, je n’y parviens pas. Je n’y parviens plus. Je n’ai plus de larmes à verser. Qu’une colère sourde et sèche.

    Et merde… Comment voulez-vous que je me sente quand tous les autres de mon année s’attendent le vendredi pour aller souper ensemble et faire la fête ? Alors que moi, je n’ose même pas en rêver. Je suis là, spectateur mélancolique, à envier tous ceux qui se racontent des blagues, se serrent dans leurs bras, s’encouragent et se consolent. Je reste seul avec ma misère à me berner de douces illusions pour me réconforter.

    Pourquoi suis-je incapable de supporter les gens heureux ? Pourquoi ai-je toujours envie d’écraser leurs sourires ? Un couteau me transperce le cœur à chaque éclat de rire qui ne m’est pas destiné. Comme si je désirais, aux tréfonds de moi, être le seul avec qui les autres peuvent avoir du plaisir. Comme si je devais posséder le monopole du bonheur. Je ne suis pas heureux ? Personne n’a le droit de l’être.

    Par le fait même, j’attire l’indifférence.

    Je suis celui que l’on oublie dès qu’on le quitte.

    Chacun des mots que j’écris me renforce dans l’idée que je n’ai pas ma place ici. Je ne veux plus n’être qu’une ombre.

    J’aimerais être les autres. Être tout ce que je ne suis pas, mais je n’en trouve plus la force.

    Ne vous en faites pas : Demain, tout ira mieux. Ces quelques mots que vous avez la force de répéter à chacun de vos passages à vide. Ces mêmes mots qui ne m’ont jamais prouvé leur valeur. Ces mots que je vais répéter une dernière fois, car c’est vrai, tout à l’heure, tout ira mieux.

    Je me rappelle quand l’idée d’en finir a commencé à se frayer un chemin dans mon esprit. J’espérais qu’une deuxième et meilleure vie m’attendait en haut, de l’autre côté.

    Aujourd’hui, je souhaite qu’il n’y ait absolument rien après. Je ne veux même pas que ce soit noir ou le néant total, car cela voudrait dire que je peux encore penser et ressentir, et ça c’est déjà tellement trop.

    Bon… J’imagine que je devrais commencer avec mes parents. Cette union de deux insensés qui m’ont engendré par accident. Ma mère n’aurait-elle pas pu m’avorter plutôt que de me faire subir leur incapacité parentale ? Ç’a l’air que ça coûtait trop cher, à l’époque, en plus d’être mal perçu. J’en déduis que l’argent et leur sacro-sainte réputation à préserver ont primé sur le bien-être que j’aurais pu avoir à ne jamais naître. S’il n’en tenait qu’à moi, elle aurait pu se faire ça elle-même avec une aiguille à tricoter. Risqué et douloureux, mais discret et sans frais.

    Je peux résumer en deux mots l’éducation que j’ai reçue de ma névrosée de mère : la peur. Craintive de tout, même de la routine la plus prévisible. Elle m’a protégé du plus inoffensif au plus improbable des dangers. Je ne pouvais pas jouer dehors en raison de menaces inconnues potentielles. Pas question d’aller chez des amis, il y a tellement de parents abuseurs d’enfants. Et n’amène surtout pas d’amis à la maison, on ne sait pas quelle mauvaise influence ils pourraient avoir sur toi.

    Que voulez-vous que ça donne d’autre qu’un enfant qui pousse tout croche ? J’ai de la difficulté à la pardonner même si je crois savoir ce qui l’a amenée à réagir ainsi.

    Tu sais quoi, maman ? Je m’en fous que tu te sois fait battre par ton père. Ou plutôt, j’ai eu de la peine une fois, deux fois, quelques fois, mais arrête de tout justifier avec cette excuse. Dis-moi… Si tu en es consciente à ce point, pourquoi n’as-tu jamais redressé ta colonne pour prendre soin de moi ? Pourquoi ne t’es-tu jamais battue contre tes fantômes pour m’apprendre à affronter les miens ? Tu as fait de moi une chiffe molle numéro deux. Je suis tombé dans le même piège que toi. Je me sens tiraillé, je me contredis, je rumine, je suis complètement embrouillé.

    Et toi, papa… Très cher papa… Je ne sais pas si tu seras capable de lire tout ce que je couche sur ce papier. Tu es sûrement saoul, n’est-ce pas ? Et quand tu dégriseras juste assez pour te rendre compte que tu es à genoux devant ma pierre tombale, tu vas vite courir te cacher derrière ton gros biberon de bière adoré. Si seulement tu m’avais déjà regardé comme tu regardais tes bouteilles.

    Je ne sais même pas pourquoi je t’écris. Ce n’est jamais de ta faute ! Toujours celle des autres, du système, de la société. Quand bien même j’essaierais de t’atteindre, c’est impossible. Tu noies le peu de sentiments dont tu es capable dans le liquide. Oh ! Tu t’es toujours permis de faire le singe avec de grands discours sur ce que ça implique de faire partie de ta famille. Tu es la risée du village, papa. Le robineux que tout le monde méprise ou prend en pitié. L’homme d’affaires à cinq cennes qui se donne des airs de magnat de la

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