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Cathéter(s)
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Livre électronique191 pages2 heures

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À propos de ce livre électronique

Tu as proche quarante ans, une famille, un agenda bien rempli. C’est au moment où tout va pour le mieux dans ta vie de femme accomplie que le chaos entre dans celle-ci par la porte d’en arrière.
Débute alors une aventure en trois temps.
D’abord, une longue suite de rendez-vous médicaux, d’innombrables couloirs d’hôpitaux arpentés, puis un diagnostic : lymphome de Hodgkin. Cancer des ganglions lymphatiques. Comment annoncer ça à ton entourage ? Comment te préparer à mettre ta vie sur pause ? Et les enfants, dans tout ça ? Le travail, les loisirs, les amis et tout le reste ?
Ensuite, des traitements, des traitements, et encore des traitements. Et tout ce qui vient avec. La moitié d’une année passée dans un quotidien pas naturel qui devient pourtant rapidement une routine rassurante.
Puis, l’Après. Parce qu’après la course contre le mal, c’est l’épuisement. L’incertitude. Les doutes. Un grand vide à remplir, petit à petit.
Tout au long de l’aventure, car c’en est bien une, tu tentes de garder la tête froide. À travers les hauts et les bas de ton état physique, de ton moral, aussi (surtout), tu apprends à te moquer de toi et à dédramatiser la situation auprès de tes proches. Parce que ce qui t’arrive n’empêche pas le soleil de faire fondre la neige ni le téléphone de sonner. Et parce que, parfois, il vaut mieux en rire qu’en pleurer.
LangueFrançais
Date de sortie2 déc. 2021
ISBN9782897755652
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    Aperçu du livre

    Cathéter(s) - Marie-Ève Bisson

    PARTIE I

    C’était l’hiver et puis soudain les érables se sont mis à couler tous en même temps

    ou

    Comment tout a commencé

    C’est le Nouvel An. Année après année, ça te fait drôle de voir changer ce chiffre sur le calendrier. On dirait chaque fois une date futuriste, sortie tout droit d’un roman de science-fiction. Le temps passe tellement vite. Tu te rappelles comme si c’était hier où tu étais lors du passage à l’an 2000. Tout en regardant tes enfants prendre des photos avec leur tablette, tu penses à cette époque pas si lointaine où Internet n’existait pas.

    Tu es née il y a 39 ans et des poussières.

    ***

    Il fait -18 °C en ce début de janvier. Une température idéale pour te geler les broches dans la bouche. Ou pour que la langue te colle dessus, tiens. Maudites broches. Tu as drôlement hâte que ça soit fini, ce projet ! Ton cadeau de toi à toi pour tes 40 ans : de belles dents droites !

    Tu viens de passer un magnifique temps des fêtes en famille au chalet. Jeux de société, patin sur le lac, ski, raquette en forêt, vous êtes même allés faire de la trottinette des neiges, tirés par des chiens de traîneau. Fillette a eu de la misère un peu ; avec ses 10 ans tous frais, elle était trop légère pour l’enthousiasme de son chien. Fiston, au contraire, du haut de ses 12 ans, était prêt pour faire de la grande vitesse. Il a été bien déçu, le chien qui lui avait été attitré ayant manifestement décidé que sa journée était finie et que le temps était venu de s’arrêter pour renifler les sous-bois à droite et à gauche ! N’empêche, vous avez eu bien du plaisir. Une autre bonne idée de Chéri, qui continue de te surprendre et de t’émerveiller après quinze ans de vie commune.

    Ça fait changement de la routine de l’année scolaire. De septembre à mai, tu as tout un horaire, avec le karaté trois fois par semaine (tu as commencé à pratiquer avec les enfants et tu y as rapidement pris goût !), les cours de musique de Fiston, l’école de théâtre de Fillette, les activités sportives de fin de semaine en famille… Sans compter que tu aimes voyager, que tu participes aux activités de vente de l’érablière familiale et que tu travailles, quand même, 35 heures par semaine dans la fonction publique.

    Bref, tu es une maman occupée, mais comblée.

    Tu es heureuse. Pas de ce bonheur factice, qu’on prétend avoir atteint quand on a enfin toutes les bébelles qu’on veut, mais d’un bonheur plus subtil, calme, le bonheur d’avoir trouvé l’équilibre dans ta vie, d’aimer ce que tu as, ce que tu es, ce que tu fais. Ce bonheur qui te fait sourire pour rien quand tu es seule dans ta voiture à l’heure de pointe.

    C’est un bonheur construit de petites choses, comme ta retraite des Fêtes en famille au chalet. Des Fêtes reposantes, desquelles tu as l’impression de revenir en pleine forme, contrairement aux collègues qui seront sans doute épuisés d’avoir couru la parenté, les festivités et les microbes pendant deux semaines.

    ***

    Retour à la maison après deux semaines déconnectée. Tu prends tes courriels. Mis à part quelques souhaits de bonne année, il n’y a que de mauvaises nouvelles. On t’annonce que ta collègue de travail absente depuis plusieurs semaines est décédée le 2 janvier – tu ne savais pas exactement ce qu’elle avait, alors c’est tout un choc. Tu apprends la séparation d’un couple d’amis qui te sont chers – un autre choc. Tu lis ensuite qu’un dégât d’eau dans l’édifice où tu travailles a détruit une bonne partie des dossiers qui étaient sur ton bureau. Génial…

    Tu décrètes que ça va être une année de merde.

    Tu ne croyais pas si bien dire.

    ***

    C’est dimanche. Demain, retour à la routine. École pour les enfants, boulot pour les grands. Tu passes un coup de fil à tes parents. D’un geste machinal, tu poses ta main dans ton cou pendant que tu parles. Tes doigts tombent pile sur une bosse que tu n’avais jamais remarquée. En fait, il y en a une de chaque côté, près des clavicules. C’est symétrique, donc pas vraiment inquiétant. Tu n’avais jamais réalisé que tes ganglions étaient aussi proéminents. Ou peut-être que tu couves simplement quelque chose, alors ils sont un peu enflés, un peu plus gros que d’habitude. Quand tu raccroches le téléphone, tu n’y penses déjà plus.

    En soirée, vous soulignez la fin des vacances en famille, avec un bon verre de vin, devant le feu de foyer. Vous vous amusez bien et tu éclates de rire à plusieurs reprises. Tu t’aperçois que tu mets souvent la main sur ton cou quand tu ris lorsque tes doigts rencontrent à nouveau ces deux petites bosses. C’est surprenant que tu n’aies jamais remarqué ces ganglions avant. Tu décides d’en parler à Chéri. A-t-il des ganglions à cet endroit ? Il touche dans ton cou et sursaute. Ouache ! À son avis, ce n’est vraiment pas normal. Une de ses collègues de travail a déjà eu un cancer des ganglions et ça a commencé comme ça. Il pense que tu devrais prendre rendez-vous avec ton médecin.

    Ben voyons. Un cancer des ganglions. Chéri a toujours été un peu hypocondriaque. Il est du genre à surfer sur Internet à la recherche de réponses quand il a mal quelque part. Il s’est déjà autodiagnostiqué une méningite, une tumeur au cerveau et la maladie de Crohn, diagnostics qui se sont tous révélés faux, cela va de soi. Tu ne prends donc pas son avis bien au sérieux. Tu te dis que tu en parleras à ton médecin la prochaine fois que tu iras, si c’est encore là. Faut pas virer fous.

    ***

    En ce premier matin du retour des Fêtes, Fillette a rendez-vous à la clinique pour faire brûler ses verrues plantaires. Tu te demandes bien comment elle a fait ça, mais elle en a plein les dessous de pieds. Le traitement est douloureux, Fillette pleure et morve dans son toutou préféré, qu’elle a heureusement apporté avec elle. L’infirmière te dit que ça risque de prendre plusieurs traitements, idéalement toutes les deux semaines. Joie. Tu te demandes comment ça se fait qu’au 21e siècle, on torture encore les enfants de la sorte. Il doit bien y avoir une autre façon de faire disparaître des verrues, non ?

    Le retour au boulot est pénible. Tu passes la première semaine à faire du ménage dans ton bureau humide, à essayer de récupérer ce qui peut l’être, à faire le bilan des pertes. L’ambiance est mortuaire, des fleurs sont déposées sur le bureau de ta collègue décédée.

    Ses funérailles ont lieu le samedi suivant. Tu ne peux y assister, tu as une fête de famille à l’autre bout de la ville au même moment. Tu transmets tes sympathies par écrit à la famille de la défunte.

    Au retour du week-end, tu discutes avec ta voisine de bureau, qui est allée faire son tour au salon funéraire. Elle a beaucoup parlé avec la sœur de la défunte. À partir du moment où ils ont découvert son cancer, tout est allé très vite. Il faut dire qu’il était un peu tard pour les traitements. Elle a trop attendu avant de consulter. Il y avait déjà plusieurs mois qu’elle avait découvert cette protubérance sur le côté de son abdomen quand elle a finalement vu son médecin. Elle aurait peut-être pu être sauvée si elle avait été prise à temps. Ou peut-être pas. Le foie, ça ne pardonne pas.

    Tu écoutes parler ta collègue et tu te fais la réflexion que, si ce n’est pas un message que l’Univers t’envoie, ton nom est cochon. Quand tu te découvres une bosse, tu vas consulter. D’accord. C’est compris.

    Puisque ça peut prendre un mois pour avoir un rendez-vous avec ton médecin de famille, tu appelles tout de suite, afin de le voir le plus tôt possible. Ça tombe bien, il y a une annulation ce jeudi. Ça doit être l’Univers qui veut te faire savoir que tu as bien fait de l’écouter…

    Tu ne le sais pas encore, mais c’est le début du marathon des rendez-vous. Parce que tes enfants vont aussi se mettre de la partie, histoire que ce soit le chaos bien comme il faut dans ta vie quotidienne.

    ***

    Jeudi 18 janvier. Tu as rendez-vous chez le médecin. Tu lui expliques que tu as des bosses dans le cou, derrière les clavicules. Non, aucun symptôme de grippe, aucune fièvre, aucun mal de tête, rien. Tu reviens de vacances reposantes et tu es en pleine forme. Tu lui dis en riant que Chéri t’a obligée à consulter parce qu’il pense que c’est un cancer des ganglions. Le médecin t’offre son silence pour toute réponse. D’accord… Soudainement, tu as moins envie de prendre tout ça avec légèreté.

    Le médecin t’envoie immédiatement passer une radiographie des poumons, pour voir s’il ne s’y trouve pas quelque chose d’anormal, et il te prescrit une échographie du cou. Tu en profites pour lui parler de tes menstruations, qui sont irrégulières depuis près d’un an. Tu te trouves un peu jeune pour commencer la préménopause… Il te prescrit une échographie pelvienne, pour éliminer la possibilité d’un fibrome. Ensuite, vous jaserez ménopause, s’il y a lieu.

    Bon. Tu descends à l’étage passer ta radiographie. Tu ne saisis pas trop ce qu’il y aurait à voir dans tes poumons, mais enfin. Tu retournes chez toi sans avoir de réponse ni de piste sur ce qui t’arrive – si seulement il est en train de t’arriver quelque chose.

    Vendredi 19 janvier. Tu reçois un appel du médecin, qui te confirme que tout est normal au niveau des poumons. Merci bien.

    Lundi 22 janvier. Rendez-vous de Fillette à la clinique pour ses verrues plantaires. Encore des larmes et de la morve.

    Mercredi 24 janvier. Tu reçois un coup de fil de l’hôpital, pour prendre rendez-vous pour l’échographie pelvienne.

    Vendredi 25 janvier. Un autre appel, d’un autre hôpital, cette fois pour l’échographie du cou. Tu réussis à caser ça dans la même journée que l’échographie pelvienne, question de ne prendre qu’un seul jour de congé pour tout faire.

    Lundi 5 février. Rendez-vous de Fillette à la clinique pour ses verrues plantaires.

    Mardi 6 février. En avant-midi, tu vas à l’hôpital pour ton échographie pelvienne. C’est la même échographie que lors de tes grossesses, sauf que cette fois-ci il n’y a rien à voir. Pas mal moins captivant, disons. Le radiologiste te rassure tout de suite, il n’y a rien d’anormal. Pas de fibrome ici. C’est bien vide. Tant mieux.

    Après être retournée dîner chez toi, tu te rends dans l’autre hôpital, pour ton échographie du cou. Tu regardes l’écran et tu constates que, franchement, il n’y a pas grand-chose à voir dans un cou. C’est tout gris et flou. Tu te demandes comment ils peuvent bien faire pour y comprendre quelque chose. La technicienne prend des mesures de tes bosses. Il y en a plus de deux, en fait ; il y en a de plus petites un peu plus loin du cou, vers les épaules. La radiologiste confirme la présence de ganglions (grosse nouvelle) et précise que leur diamètre est un peu au-dessus de celui de ganglions normaux (on avait remarqué). Elle transmettra au médecin sa recommandation de poursuivre l’investigation.

    OK, ça servait à quoi, déjà, ce rendez-vous ?

    Jeudi 8 février. Tu reçois un appel de l’hôpital, on te donne rendez-vous la semaine prochaine en hémato-oncologie – non, tu n’as pas le choix de la date ou de l’heure.

    Hémato-oncologie. n. f. Branche de la médecine consacrée à l’étude et au traitement des affections hématologiques et des cancers. L’hématologie-oncologie s’intéresse particulièrement au traitement du cancer au moyen des greffes de moelle osseuse. (Grand dictionnaire terminologique)

    Hum. Ça sonne comme du vrai bonheur, cette histoire.

    Lundi 12 février. Les enfants ont rendez-vous chez l’orthodontiste. Fillette s’en tire avec un rappel dans deux ans, mais Fiston doit se faire arracher une dent de lait, parce que la dent d’adulte est en train de passer à côté. Chouette alors.

    Vendredi 16 février. Tu as rendez-vous avec l’hémato-oncologue à l’hôpital. Tu trouves ton chemin jusqu’au département d’oncologie dans les dédales de corridors. Après avoir donné tes cartes à la dame de l’accueil, tu t’assois dans la salle d’attente bondée. Ça te fait tout drôle d’être là, au milieu de tous ces gens probablement atteints de cancers. Tout le monde a l’air d’avoir au-dessus de soixante ans. Tout ça est irréel. Tu ne concordes pas.

    Le médecin t’est sympathique. Il t’ausculte, te palpe sous le menton, dans le cou presque jusqu’aux épaules, sous les aisselles, sur le ventre, dans l’aine. Bref, partout où il y a des ganglions. Dans le métier, on y va par élimination, alors il faut faire d’autres tests et vous vous reverrez ensuite. Il se veut rassurant : on ne sait pas encore ce que c’est, donc on ne panique pas. Peu importe ce que c’est, ça se soigne. On respire, on investigue et on s’en reparle.

    À venir, donc, une prise de sang, pour éliminer l’éventualité d’un virus, et un TACO, pour aller voir si d’autres ganglions, ailleurs dans le corps, ont aussi des envies d’anarchie.

    Lundi 19 février. Fiston a rendez-vous pour l’extraction de sa dent en plein milieu de l’après-midi (encore une absence du travail…). Il fait ça comme un champion. C’est étonnamment gros une dent de bébé dont la racine n’a pas été écrasée par la dent d’adulte qui doit suivre !

    Mardi 20 février. Tu reçois un appel de l’hôpital, où on te donne rendez-vous pour passer un TACO après-demain, à 7 h 45 le matin. Encore une fois, tu n’as pas ton mot à dire dans le choix de la plage horaire.

    Mercredi 21 février. Rendez-vous de Fillette à la clinique pour ses verrues plantaires.

    Jeudi 22 février. Tu te rends à l’hôpital pour ton TACO, tomodensitométrie de son vrai nom.

    Tomodensitométrie. n. f. La tomodensitométrie (TDM), dite aussi scanographie ou tomographie axiale calculée par ordinateur (TACO), est une technique d’imagerie médicale qui consiste à mesurer l’absorption des rayons X par les tissus puis, par traitement informatique, à numériser et enfin reconstruire des images 2D ou 3D des structures anatomiques. Pour acquérir les données, on emploie la technique d’analyse tomographique ou « par coupes », en soumettant le patient au balayage d’un faisceau de rayons X.  (Wikipédia)

    C’est bien, 7 h 45, comme heure de rendez-vous. Tu pourras aller travailler après comme si de rien n’était.

    On

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