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En avril 1973, Bernard Pivot « ouvrait les guillemets » de sa première émission littéraire1. Vingt-huit ans plus tard, il cesse volontairement de touiller son Bouillon de culture. Cette longévité sur un seul genre, rare dans l’histoire et dans les mœurs de la télévision, met en valeur une figure individuelle évidemment intéressante : on ne peut pas tenir aussi longtemps le haut du petit écran sans de vraies qualités d’« interprète de la curiosité publique », pour reprendre la formule de Pierre Nora2. Cette situation exceptionnelle pose un ensemble de questions plus générales, touchant à la place du livre à la télévision, à la place de la télévision dans la vie du livre, mais aussi, en profondeur, à toute cette société française qui n’en finit pas de surprendre les observateurs étrangers par l’importance qu’elle accorde aux activités culturelles. Il suffit d’avoir séjourné dans une université américaine pour savoir que le succès, voire la simple existence d’une émission comme Apostrophes […], y étaient souvent cités comme un attribut de la francité, à ajouter sans doute un jour à la liste des « lieux de mémoire » de ce drôle de pays où l’on célèbre chaque année la Saint-Beaujolais, où l’on brûle des cierges à la Bienheureuse Marguerite Duras.
D’un point de vue déprimé