En ce 1er mai 1861, Édouard Manet fait, à 29 ans, une entrée remarquée au Salon, ce rendez-vous bisannuel qui se tient au Palais de l’Industrie. Mieux, l’une de ses deux toiles, Guitarrero, lui vaut une première reconnaissance du jury qui lui décerne une mention honorable. Elle séduit aussi Théophile Gautier qui loue « cette figure de grandeur naturelle peinte en pleine pâte, d’une brosse vaillante et d’une couleur que Vélasquez lui-même aurait saluée « Un premier succès bienvenu pour le jeune homme désireux de prouver son talent à une famille bourgeoise peu convaincue par ses choix, mais éphémère… Car deux ans plus tard, le jury du Salon se montre particulièrement féroce. Et les toiles de Manet figurent parmi les quelque 2000 œuvres recalées sur près de 5000 présentées! La colère des artistes, qui couvait depuis des années, explose au grand jour. Napoléon III, toujours prompt à parfaire son image libérale, ordonne alors d’exposer les œuvres refusées dans les salles disponibles du Palais de l’industrie afin de « note Catherine Méneux (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne). Ce « Salon des refusés» accueillera finalement 1 600 œuvres, beaucoup très médiocres. Attirée par tout ce tapage, une foule dense et curieuse s’y précipite pourtant.
