SCIENCE-FICTION/FANTASTIQUE
« gémit un lecteur polonais sur un forum. Pauvre chéri ! Convoquant les éternels pouvoirs de la fiction, d’Olga Tokarczuk – le premier roman post-Nobel – donne voix, il est vrai, à un chœur redoutable. Empouses ? Démons femelles – chuchotis, grands yeux sombres – dissimulés dans les fissures, l’enchevêtrement des branches, scrutant l’agitation des hommes. À la veille de la Grande Guerre, en Silésie prussienne, le sanatorium de Görbersdorf accueille un aréopage de malades poitrinaires : mâles souffreteux mais satisfaits, digressant à l’envi sur les femmes dont le cerveau, c’est bien connu, Cependant que la forêt proche bruisse d’effroyables rumeurs (sabbats de sorcières, corps déchiquetés), Mieczysław Wojnicz, personnage fragile et merveilleusement ambigu, découvre avec perplexité les us et coutumes des lieux. N’est-il venu ici que par hasard ? Gothique en diable, admirablement construit, ce clin d’œil canaille à de Thomas Mann mène son lecteur, yeux bandés, jusqu’à un final paroxystique.