Mais qu’est-ce qui peut bien pousser un vénérable guitariste de 78 ans à repartir sur les routes en 2024? Qui plus est dans le cadre d’une tournée européenne qui se téléportera à l’automne en Amérique du Sud ? Seul Eric Clapton serait capable de répondre à cette épineuse question, lui qui, il y a quelques années de cela, se disait fatigué, autant dire quasiment prêt à prendre sa retraite. Mais les faits sont là. Le guitar hero anglais se produira bel et bien pour quatre concerts en France, à la fin du mois de mai. Il n’y avait pas joué depuis 2010 et beaucoup pensaient qu’on ne le reverrait jamais sur scène dans l’Hexagone.
Entamé en Angleterre avec, encore et toujours, plusieurs dates au Royal Albert Hall de Londres, cet European Tour 2024 est le prolongement de sa tournée internationale de l’année dernière, qui l’a vu notamment jouer au Crossroads Guitar Festival, à Los Angeles, ou au fameux Budokan de Tokyo. Mais “Slowhand” célèbre aussi cette année le 50e anniversaire de 461 Ocean Boulevard, l’un des fleurons de sa discographie, avec, entre autres merveilles, sa reprise de “I Shot the Sheriff” de Bob Marley. Un disque très personnel, enregistré sous le soleil de Floride, et qui aura beaucoup compté pour lui. Flashback.
Au printemps 1974, Eric Clapton, 29 ans, se remet d’une longue addiction à l’héroïne qui l’a conduit à se couper du monde durant des mois entiers. Reclus dans sa propriété du Surrey,voir quasiment personne. Nombreux sont ceux qui, dans son entourage, ne donnent pas cher de sa peau. Pourtant, début 1973, Pete Townshend, le guitariste des Who, parvenait à le sortir de sa saison en enfer en mettant sur pied pour lui deux concerts au Rainbow Theatre de Londres avec quelques amis, dont Ronnie Wood et Steve Winwood. Boosté par l’accueil réservé à ces performances et à l’album live qui en est tiré, Slowhand entame alors une cure de désintoxication et peut désormais envisager l’avenir avec lucidité. Le constat est loin d’être enthousiasmant. Au fond de lui, il sait qu’il doit absolument enregistrer un disque qui le réconciliera avec le succès. Mais il ne veut plus être sous le feu des projecteurs comme à l’époque des Cream, Blues Breakers ou Yardbirds. Pour lui, son statut de guitar hero est la source de tous ses maux. Il entend désormais être reconnu comme simple chanteur et songwriter.