On connaît la vacherie (peut-être apocryphe) attribuée à John Lennon : « Le rock français, c’est comme le vin anglais. » Répondons-lui sans chauvinisme : loin d’être de la piquette, notre pop égale au contraire les meilleurs whiskies écossais. Mais il est vrai que c’est parfois dans les marges de l’histoire officielle qu’il convient d’aller chercher nos génies injustement méconnus.
Alain Kan est de ceux-là. Mélange improbable d’Aristide Bruant et de Johnny Thunders, il fait ses débuts à – un voeu pieux, quand on connaît l’addiction tenace d’Alain Kan à l’héroïne. A la fois torturé (enfant, il a été violé par un paysan) et bien connecté à la scène musicale (il a pour beau-frère le chanteur Christophe), Kan navigue en eaux troubles jusqu’à un événement mystérieux : le 14 avril 1990, il prend le métro à la station Châtelet (ou Rue de la Pompe, selon les versions). Personne ne l’a plus jamais revu. Dix ans avant sa disparition, il avait écrit un roman resté inédit, , que les éditions Séguier publient aujourd’hui. C’est une découverte. Certes stylistiquement inférieur au cultissime d’Yves Adrien, plus proche des de Guillaume Serp, plaira aux nostalgiques du Palace et d’Alain Pacadis (qui apparaît dans le livre, « en manque de jeunes éphèbes »). Il y est question d’une relation toxique entre un punk et un fils de bonne famille qui habite avenue Foch – ce dernier quittera l’immeuble huppé de ses parents pour être interné en hôpital psychiatrique. Les histoires d’amour finissent mal en général, et ce n’est pas Alain Kan qui aurait dit le contraire, lui qui avait eu comme musicien Fred Chichin, futur fondateur des Rita Mitsouko…