L’homme-orchestre des Deux Plateaux au Palais Royal, lauréat d’un Lion d’Or à la Biennale de Venise 1986, a décliné dans le monde entier ses rayures de 8,7 centimètres de large, renouvelant le rapport entre le spectateur, le lieu et l’oeuvre. A 85 ans, loin de vivre une retraite dorée, Daniel Buren est sur tous les fronts. En Belgique, ses vinyles colorés ornent la verrière de la gare de Liège; à Brescia, en Italie, la galleria Minini lui consacre une exposition d’envergure; en France, enfin, une Cabane éclatée polychrome aux miroirs est visible au Mac Val de Vitry-sur-Seine, tandis que ses Plis contre plan métamorphosent la galerie Mennour de Paris. L’artiste nous a reçu chez lui, dans son repaire bucolique de l’Essonne, pour un entretien à bâtons rompus.
Si, à 17 ans, vous n’aviez pas gagné une bourse de lycéen, qui vous a notamment permis de partir au Mexique, votre parcours aurait-il été autre? Seriez-vous même devenu un artiste?
Impossible à dire, évidemment, mais cela a donné corps à des choses et j’y ai rendu quelques services, moyennant trois sous. J’ai bourlingué ici et là, je ne connaissais personne, mais, de fil en aiguille, j’ai rencontré beaucoup d’artistes, certains inconnus, et d’autres plus en vue, comme André Masson. Des collectionneurs aussi, comme Douglas Cooper et John Richardson qui m’ont reçu chez eux, au château de Castille, une somptueuse bastide remplie d’oeuvres d’art du XX siècle, dont un de Fernand Léger de toute beauté que je revois encore.