«Au cours de ma formation, on nous a appris les mots arabes pour ‘gay’».
«Parfois, cette prostitution consiste à vendre son corps. Mais parfois encore, quelqu'un va se positionner comme ‘sponsor', entre guillemets — il s'agira d'un homme qui, en échange de relations sexuelles, accordera le gîte et le couvert, peut-être d'autres aides…»
«Personne n'est donc en mesure de dire comment il s’était échappé de Cisjordanie ou quelle extrémité de violence l'avait finalement déterminé, après les sévices répétés qui avaient été infligés par sa famille»
Tous ceux qui l'ont rencontré le disent Ahmad Abu Murkhiyeh avait une personnalité qui attirait la sympathie. Cet homosexuel palestinien qui vivait en Israël était doux, posé et intelligent, des qualités qu'il mettait au service des autres. Pourtant, la haine qu'il suscitait dans sa ville natale de Hébron, si elle s’était endormie après son départ, rôdait encore. Des années de violences subies au sein du foyer familial et l'intolérance plus générale de la société palestinienne l'avaient convaincu de prendre la fuite en 2020. Bien sûr, sa vie et son statut étaient précaires en Israël — mais elle était tellement plus sûre.
Mais le mois dernier, Abu Murkhiyeh était retourné en Cisjordanie. Une vidéo macabre postée sur les réseaux sociaux avait montré sa décapitation par un agresseur non-identifié. Le suspect, un Palestinien apparemment, a bien été arrêté et interrogé, mais son identité n'a pas été rendue publique et tout indique qu'il a donné la mort à Abu Murkhiyeh en raison de son orientation sexuelle. Et même avant que sa vie ne s'interrompe brutalement, le jeune homme de 25 ans vivait dans une incertitude que connaissent trop bien les autres homosexuels palestiniens en Israël. Placés dans l'obligation de quitter leurs foyers par crainte d’être tués pour sanctionner leur « immoralité », ce sont des dizaines de gays palestiniens qui se sont mis en quête de la sécurité relative que leur offre Israël — même si se rendre dans le pays est par nature un voyage périlleux. Pour ceux qui parviennent à sortir de la Cisjordanie, la vie qui les attend est remplie d'incertitudes ahurissantes et de dangers mortels qui viennent douloureusement s'ajouter aux traumatismes qu'ils ont déjà subis.
L'homosexualité reste profondément rejetée dans la société palestinienne. Selon un sondage réalisé en 2019, 50 % seulement des Palestiniens interrogés avaient estimé que la société devait tolérer l'homosexualité — c'est le pourcentage le plus bas de tous les pays arabes.
Les homosexuels palestiniens évoquent pêle-mêle les violences brutales, l'isolement forcé, les tentatives de meurtre de la part de membres de leur famille et une myriade d'autres persécutions à leur encontre en raison de leur orientation sexuelle. Pendant des années, Abu Murkhiyeh avait subi les violences physiques des membres de sa famille, selon ceux qui le connaissaient.
Ces violences avaient atteint une telle fréquence et une telle férocité qu'en 2020, le jeune homme avait considéré qu'il n'avait plus d'autre choix que de fuir en Israël et de rompre toutes les relations qu'il entretenait avec sa famille. Il