La tempête et la brume sont, pour les marins de Terre-Neuve, deux sources de grands dangers », écrivait en 1936 le Père Yvon, célèbre aumônier des terre-neuvas. « Cependant (…), ce n’est pas là ce qui donne à la grande pêche son caractère dur et pénible. » Pendant près de cinq siècles, ces rudes pêcheurs ont bravé les eaux glaciales de l’Atlantique Nord, ramenant chaque année dans les ports français des milliers de tonnes de morue. À Fécamp, « capitale des terre-neuvas» au lendemain de la Première Guerre mondiale, cette aventure a cessé en 1987. Mais sa mémoire est toujours vive…
La mythologie qui s’est construite autour des terreneuvas fluctue entre misérabilisme et geste héroïque. L’étiquette de « bagnards de la mer» colle à la peau de ces pêcheurs exilés pour de longs mois sur les bancs de Terre-Neuve, exploités par des armateurs peu scrupuleux et contraints à un labeur harassant. Dans la littérature, on force parfois le trait sur les drames humains, le manque d’hygiène, la souffrance, l’alcool… Mais la mémoire collective retient aussi leur courage et concède l’ethnologue Loïc Josse.