Quand les rois et les princes décident de s’installer dans ce Val de Loire béni des dieux, ils ne se contentent pas d’ériger des châteaux à leur goût. Dans leur conquête d’une certaine douceur de vivre, ils vont ordonnancer leur environnement, ne plus limiter l’architecture aux murs du palais et ouvrir leur résidence aux beautés d’une nature réglée et harmonieuse. Le vent puissant de la Renaissance italienne chamboule l’étriqué jardin clos du Moyen Âge. Avec ses premiers parterres ourlés de buis disposés en belles perspectives médianes ou en étoile, le jardin devient lieu d’agrément et bientôt spectacle. Pour autant, l’évolution vers ce qu’il est convenu d’appeler depuis la fin du XIXe siècle « le jardin à la française » sera douce, graduelle, d’influences multiples et ne manquera pas de rebondissements.
En ce milieu de XV siècle, le jardin se pelotonne, encore pudique et modeste, dans l’intimité feutrée des cloîtres d’abbayes et des enceintes de châteaux. L’, le jardin clos, engoncé dans ses murs, est formé le plus souvent de « carreaux » – des plates-bandes carrées surélevées – séparés par des allées dont tempère Lucie Gaugain, maître de conférences en histoire de l’art médiéval à l’université de Tours. La tradition voudrait que Charles VIII, émerveillé par les jardins de Poggioreale près de Naples, soit revenu à sa cour d’Amboise accompagné d’un aréopage d’artistes et d’artisans dont le prêtre Pacello da Mercogliano, maître jardinier et ingénieur hydraulique.