Diapason

John Eliot Gardiner Huit décennies et cinq siècles

Si vous fréquentiez le Théâtre des Champs-Elysées à la fin du XXe siècle, vous pensiez peut-être que le compositeur chéri de notre maestro était Gustav Mahler. Symphonie no 4 le 2 février 1994 avec la NDR de Hambourg dont il était alors « directeur musical ». Concert suivant, le 17 avril 1998 : Chant de la terre (et Sinfonietta de Janacek) avec le National Youth Orchestra. Et que vendait le disquaire voisin ? Les Lieder eines fahrenden Gesellen avec Anne Sofie von Otter. Or, au même moment, selon que vous visitiez Londres, Vienne ou Paris, John Eliot Gardiner restait l’apôtre de Monteverdi, le maître du chœur handélien, le champion de Berlioz dont il rapportait la Symphonique fantastique à son auditorium natal et assurait la recréation mondiale d’une messe perdue. Ou la baguette des muses légères qui tirait des Wiener Philharmoniker une Veuve joyeuse, une España de Chabrier, un Tourbillon-Galopp de Lenner promis au Concert du nouvel an que nous attendons toujours. Ou le célébrant d’un Bach Millenium en deux cents cantates inauguré la semaine de Noël 1999.

Oratorios de Haydn, requiem de Britten, de Fauré, de Verdi, symphonies de Beethoven, de Schumann, de Brahms, psaumes de Victoria, de Vivaldi, de Lili Boulanger, danses de Rachmaninov, de Dvorak, opéras de Mozart, de Bizet, de Stravinsky, chansons de Kurt Weill, poèmes d’Elgar… chaque fois au cœur du sujet, passant des nuits à ausculter la partition autographe de Pelléas et Mélisande, les lettres de Bach, le plan des formations viennoises, les archives de la Révolution française.

Insaisissable, non résumable, l’homme a pourtant un style. Tigre en studio, chat en concert, le geste net et rond détectant l’infime créature à travers la polyphonie, swing irrésistible. Que nous allons suivre en saluant ses neuf muses historiques, avant d’aller à sa rencontre.

MONTEVERDI

Tout commence jeudi 5 mars 1964. Un étudiant monté de son Dorset natal a constitué un chœur sans modèle. Chœur adulte et mixte révélé dans le nid des angelots qui ont fait la gloire de Cambridge : la chapelle de King’s College. Admis à l’université pour apprendre l’histoire et l’arabe classique, le jeune homme ne découvre de Monteverdi, œuvre qu’il découvrait jadis à la radio, et qu’il entend aussi jeune que lui, sonore, latine, dramatique, à rebours des usages locaux.

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