En ce début du XIXe siècle, l’Empire ottoman est aux abois. Son territoire, qui s’étendait, au faîte de sa gloire, sur l’Europe, l’Afrique du Nord et l’Asie, ne cesse de rétrécir. Plus inquiétant, l’irrésistible poussée expansionniste des Russes dans les Balkans et le Caucase le fragilise un peu plus. La situation intérieure n’est guère plus florissante. Son incapacité à se réformer et à intégrer véritablement ses minorités religieuses, notamment les chrétiens d’Arménie, et à garantir l’égalité des droits de tous ses sujets, qu’ils soient musulmans ou non, l’a affaibli aux yeux des grandes puissances occidentales qui lorgnent sans vergogne « l’homme malade de l’Europe ». Sans compter la montée des revendications et des aspirations autonomistes des uns et des autres…
UN LONG CHEMIN DE CROIX
L’effervescence est perceptible dans les provinces occidentales de explique l’historien Raymond Kévorkian, directeur de recherche émérite à l’Université Paris 8. Les grandes réformes réorganisatrices lancées par la Sublime Porte (le gouvernement nommé par le sultan) au milieu du XIX siècle (les « ») améliorent quelque peu leur sort. Une plus grande autonomie cultuelle et culturelle leur est ainsi accordée. poursuit l’historien. C’est le cas dans les provinces de l’est où les paysans arméniens subissent régulièrement les pillages et les violences des tribus kurdes avec lesquelles ils cohabitent. Au début des années 1860, des révoltes éclatent même à Erzéroum et Van, près de la frontière russe. Maintes fois répétées, les demandes de réformes resteront lettre morte.