Diapason

La baguette de feu

Au Barbican Hall en septembre 2017, alors qu’il vient de prendre la direction du London Symphony Orchestra, Simon Rattle prouve une fois de plus sa maîtrise et sa profonde connaissance de la musique de Stravinsky.

Dans les trois ballets qui ont fait à eux seuls l’immortalité du compositeur, le geste sûr du chef, sa souplesse de phrasé donnant beaucoup de relief et de couleurs, établissent une communion immédiate avec une phalange londonienne à son meilleur. Leur lecture analytique, narrative mais également scintillante et sensuelle de L’Oiseau de feu éblouit par sa précision de chaque instant et de tous les pupitres. Hormis Ansermet à la tête du New Philharmonia et les deux gravures de Boulez, combien d’autres interprétations, qui plus est captées en concert, peuvent se prévaloir d’une telle dynamique d’ensemble, somptueuse dans ses inflexions, de cette attention rare à chaque détail et pourtant en rien oublieuse de la composante chorégraphique de l’œuvre ?

Plus escarpée, plus intrigante avec ses arêtes vives, l’approche de Pétrouchka (dans l’édition révisée de 1947) étonne par sa fraîcheur et, malgré les apparences et l’audacieuse sophistication de certains phrasés, par le naturel de son déroulement : sir Simon dirige, comme s’il la découvrait ici, une des pierres angulaires de son répertoire. Le rejet des mixtures, l’exaltation du timbre pur, la discontinuité rendant évidentes polytonalité et polyrythmie y semblent d’abord fragiliser toute vue d’ensemble, mais sans jamais la rompre.

Electrisant

L’exigence romantique du sublime, la dimension symphonique, unitaire et envoûtante, reprennent tous leurs droits dans un Sacre du printemps dont le souffle et la conduite nous électrisent. La première partie (L’Adoration de la terre), implacable et magistralement articulée, frise ici la perfection. Saluons également la qualité de la prise de son. Plus encore que dans sa précédente et rutilante version avec les Berliner Philharmoniker (Emi-Warner, Diapason d’or), le chef anglais semble avoir fait siennes, avec parfois des nuances prononcées, les vertus d’un Pierre Boulez : approfondissement rythmique, éclairage acéré des lignes de la polyphonie, transparence de la trame, justesse des tempos.

Dans le sublime prélude de la seconde partie, dont jamais Stravinsky n’a dépassé le raffinement harmonique et la mystérieuse puissance d’émotion, Rattle, à l’instar d’Ansermet, refrène l’expressivité naturelle des cordes (peu de vibrato, de moelleux dans l’archet). L’enchaînement des Cercles mystérieux des adolescentes, Glorification de l’élue et Evocation des ancêtres, sans perdre l’extrême cohérence dans l’architecture des développements rythmiques qui existait avec Berlin, gagne en urgence dramatique.

IGOR STRAVINSKY

1882-1971

L’Oiseau de feu. Pétrouchka. Le Sacre du printemps.

London Symphony Orchestra, Simon Rattle.

LSO Live (2 SACD). Ø 2017. TT : 1 h 56’.

TECHNIQUE : 4,5/5

Enregistrements sur le vif réalisés par Jonathan Stokes et Neil Hutchinson : les trois ballets étaient au programme du même concert, donné les 21 et 24 septembre 2017 au Barbican Hall de Londres. Une image orchestrale ample, conservant une avantageuse précision d’une captation à l’autre. Des sonorités plantureuses et une excellente dynamique.

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GRAZYNA BACEWICZ

1909-1969

Sonates pour piano nos 1 et 2. Krakowiak de concert. Dix études de concert. Deux études en doubles notes.

Peter Jablonski (piano).

Ondine. Ø 2021. TT : 1 h 11’.

TECHNIQUE : 3,5/5

Excellente violoniste, Grazyna Bacewicz n’a jamais délaissé le piano. Elle était même assez aguerrie pour créer en 1953 sa Sonate n° 2, qui exige de grands moyens. Les oeuvres réunies par Peter Jablonski montrent que si le clavier occupe dans sa production une place moins importante que l’archet, il lui a inspiré de fort belles pages. Sa Sonate n° 1, à la croisée du néoclassicisme et de l’inspiration populaire, atteste déjà, en 1949, la verve rythmique et le lyrisme fiévreux qui caractérisent la compositrice polonaise. De son scherzo et de son finale se rapproche, la même année, le Krakowiak de concert, aux embardées virtuoses, plein d’esprit, pas encore affranchi, lui non plus, de la tonalité. Et il faut s’arrêter sur les Dix études de concert (1956), sa dernière oeuvre d’envergure pour piano seul. On pense à Chopin et à Debussy, au Szymanowski de l’Opus 33 et au Bartok de l’Opus 18 : au-delà de l’agilité, elles fusent tels des éclairs de rythmes et de couleurs. Sans viser une difficulté répertoriée, elles éprouvent assez les doigts pour n’être pas confiées aux apprentis pianistes.

Jablonski y respecte les très précises indications données par Bacewicz elle-même, évitant toute sécheresse mécanique dans les mouvements perpétuels de la no 1 ou de la no 4, colorant subtilement les rêveuses nos 5 et 8, s’amusant dans la facétieuse et swinguante no 2, jubilant dans le Giocoso de la no 7, percevant l’inquiétude qui sourd dans la volubile no 10.

La verdeur percussive du Krakowiak échappe à toute dureté, comme le coruscant finale de la Sonate n° 1, digitalement redoutable, dont l’Andante sostenuto ne manque pas de poésie. La Sonate n° 2, proche de la no 1 par l’esprit mais beaucoup plus aboutie (c’est l’un de ses chefsd’oeuvre), soutient ici la comparaison avec la gravure de Krystian Zimerman (DG, Diapason d’or, cf. n° 590) par la maîtrise de la forme, la transparence de la polyphonie et l’invention chromatique, pour ne rien dire de l’alacrité digitale – écoutez l’oberek de la Toccata finale. Jablonski s’y montre différent, plus sombre, penchant vers Prokofiev, que cette sonate rappelle d’ailleurs parfois, quand Zimerman y lorgnait davantage vers Debussy.

Didier Van Moere

CARL PHILIPP EMANUEL BACH

1714-1788

Sonates en trio Wq 83, 143, 145, 149. Sonate pour flûte seule Wq 132. Fantaisie en fa dièse mineur Wq 67.

François Lazarevitch (flûte), Justin Taylor (pianoforte).

Alpha. Ø 2020. TT : 1 h 20’.

TECHNIQUE : 4,5/5

Révisées en 1747, les Sonates en trio Wq 143-147 de Carl Philipp Emanuel Bach sont l’œuvre d’un jeune homme de dix-sept ans s’exerçant sous le regard de son père tout en cherchant déjà sa propre voix. Longtemps attribuée au Cantor, la Wq 145 illustre, en ses mouvements extrêmes, cette proximité ; son Largo central matérialise néanmoins une échappée vers l’Empfindsamkeit. On pourrait en dire autant de la concise Wq 143, quand la Wq 149, composée en 1747, adopte un langage plus galant.

François Lazarevitch et Justin Taylor abordent en duo ces pages écrites à l’origine pour violon, flûte et clavier ; que ce dernier assume à lui seul deux parties est une pratique attestée. Assurant un soutien rythmique ferme mais dépourvu de systématisme, le pianoforte se montre à son avantage dans le clair-obscur (Allegro un poco de la Wq 83) et l’effusion intimiste (Largo de la Wq 145), mais un rien plus en retrait lorsque le discours s’enflamme. La testamentaire Fantaisie Wq 67 pâtit de ce déséquilibre – on trouvera plus de relief dramatique chez Miklos Spanyi (Bis). Charnue, habile dans ses ornements, la flûte manque parfois de finesse, dont l’Allegro di molto de la Wq 149 offre un exemple parlant : la volonté d’affirmation de Lazarevitch, par ailleurs brillant, malmène la délicatesse prodiguée par son partenaire dans l’Andante. Si sa lecture de la Wq 132 est intense, d’autres, tel Barthold Kuijken (Accent), ont su lui insuffler une versatilité plus en phase avec l’esprit d’Emanuel. Pour les trios (avec l’effectif complet), on reviendra aux disques éloquents et soignés des Amis de Philippe (CPO, 2003) ou d’Alexis Kossenko (Alpha, 2014, Diapason d’or) : ils nous font percevoir ce qui manque à cette réalisation, malgré ses qualités.

Jean-Christophe Pucek

JOHANN SEBASTIAN BACH

1685-1750

« The Imaginary Music Book of J.S. Bach ». Sinfonias des cantates BWV 29 et 182. Sonate de L’Offrande musicale BWV 1079. Transcriptions de Von deinen Thron BWV 668, d’airs des Cantates BWV 24, 29, 36, 169. C.P.E. BACH : Sonate en trio Wq 161/2. MOZART : Adagio et fugue KV 404a.

Café Zimmermann.

Alpha. Ø 2020. TT : 1 h 14’.

TECHNIQUE : 4/5

Pour son « Livre imaginaire », le Café Zimmermann mêle à deux sonates en trio de Bach père et fils un bouquet d’arrangements maison. Deux brèves sinfonias tirées des Cantates BWV 29 et 182 sont réduites sans perte de couleurs ni, surtout, de vivacité et les transcriptions d’arias ne manquent pas non plus d’attraits. Même privées de la voix, la jubilation radieuse de « Hallelluja, Stärk’ und Macht » (BWV 29), la fermeté d’âme de « Ein ungefärbt Gemüthe » (BWV 24) s’épanouissent avec plénitude. « Gott soll allein mein Herze haben » (BWV 169) manque, en revanche, d’intériorité. Bach avait prévu l’emploi d’un violon avec sourdine dans « Auch mit gedämpften » (BWV 36) : son absence appauvrit l’intention rhétorique, malgré la sonorité charnue de l’instrument, son dialogue complice avec la flûte.

Dans la sonate en trio de L’Offrande musicale, beauté des timbres, intelligence de la conduite, subtilité des nuances nous ravissent et font regretter de ne pas disposer du cahier entier. Sous des dehors aimables, la Sonate Wq 161/2 de Carl Philipp Emanuel laisse entrevoir des humeurs plus inquiètes, traduites avec délicatesse. Loin d’un banal exercice de style, l’Adagio et fugue KV 404a de Mozart mêle à la rigueur du modèle un charme diaphane que souligne la flûte substituée à l’alto prévu par le compositeur-transcripteur. Ce disque très réussi atteste une nouvelle fois les affinités de Café Zimmermann avec l’univers du Cantor, auquel nous espérons le voir revenir.

Jean-Christophe Pucek

Variations Goldberg.

Jonathan Bénichou (piano).

Calliope. Ø 2020. TT : 1 h 19’.

TECHNIQUE : 3/5

De mon temps, il y avait encore des professeurs de piano qui expliquaient à leurs élèves que « les doigts sont de petits marteaux ». Ici, ce sont de gros maillets. L’aria, lentissime, permet d’apprécier un toucher de bûcheron qui n’ira pas se raffinant avec la précipitation (Variation VIII). « Ce projet d’enregistrement […] est le fruit d’un long cheminement ». Le résultat aurait gagné à ce que ce cheminement inclût le travail des trilles. En effet, ce que Jonathan Bénichou appelle placer le piano « à la jonction du clavecin et de l’orgue » semble être de dévider toute une table d’ornementation en donnant systématiquement un gros coup sur la première note… aussi, rarement ornement, s’insérant aussi peu dans le discours, a-t-il autant substitué la grossièreté à la grâce expressive qui est tout son objet : les Variations II à IV suffiront à vous éclairer sur ce point, notamment les hideux trilles de terminaison de la III et les coulés de la IV, qui portent bien mal leur nom ; si après ça vous tenez à persister, vous ne direz pas qu’on ne vous a pas prévenus.

Car, outre ces agréments si peu agréables, il y a encore ce soulignement à la truelle de chaque intention, de chaque motif, de chaque articulation, avec ce cognement permanent qui, dans l’acoustique « naturellement réverbérante » d’un temple, donne une impression de musique amplifiée… tout cela est épuisant. A la fin de l’écoute, je me suis repassé la version de Hannes Minnaar comme un moment de respiration et de bonheur bien mérité après l’épreuve.

Paul de Louit

EMANUELE BARBELLA

1718-1777

Six duos pour deux violons ou deux mandolines et basse.

Quartetto PizzicArco.

Stradivarius. Ø 2018. TT : 1 h 12’.

TECHNIQUE : 2/5

Pour ne pas avoir été un violoniste comme Vivaldi, Veracini, Tartini ou Locatelli, ni un compositeur d’opéras, Emanuele Barbella fait partie de cette catégorie de musiciens laissés sur le carreau par la postérité. Et c’est bien dommage, car il incarne l’esprit et la fantaisie inimitable de la musique italienne et en particulier napolitaine. Burney saluait sa « sympathique folie » et affirmait qu’avec un peu plus de « vivacité », Barbella aurait été « unique en Europe ».

La vivacité n’est pas ce qui fait défaut aux quatre musiciens de PizzicArco. Hélas desservi par une prise de son déséquilibrée, le mélange mandoline, violon, guitares et colascione n’en dresse pas moins le décor d’une comédie fine où alternent danses élégantes (Canzona alla napolitana) et frénétiques (alla Venezia). Le théâtre est poussé au paroxysme dans les balli de Pulcinella e Coviello, du Mago e Pluto et autres pastorelle, sans parler de ce Bacchus mettant en joie une dame germanique.

Ainsi la musique jongle entre le jaillissement naturel d’un motif populaire et des fourberies d’écriture (Trio in minore dove ballano tutti i diavoli) qui rappellent Scarlatti, Boccherini ou même Haydn, avec en sus une touche de nonchalance mêlant passions et tragédies (compassionevole e piangendo) à un élan de fraîcheur triomphal. Voilà qui devrait séduire les curieux !

Olivier Fourés

LUDWIG VAN BEETHOVEN

1770-1827

Concertos pour piano nos 1 et 3.

Kristian Bezuidenhout (pianoforte), Freiburger Barockorchester, Pablo Heras-Casado.

HM. Ø 2017. TT : 1 h 07’.

TECHNIQUE : 5/5

Kristian Bezuidenhout achève son intégrale des concertos de Beethoven, tous enregistrés en deux soirées consécutives mais distillés au gré de trois volumes. Fraîcheur juvénile du no 1, dans un ut majeur insouciant et lumineux ; extrême théâtralité du génial no 3, dans un ut mineur incisif : « pour éprouver le choc que devait produire cette musique, il faut interpréter ces oeuvres dans un profond respect des traditions d’exécution musicale du XVIIIe siècle finissant », écrit le soliste. Une évidence en ce qui concerne l’élégance cristalline de son pianoforte. Cette copie d’un Graf de 1824 réalisée par Rodney Regier épate par l’extrême amplitude de ses timbres, nuances, attaques… Quelle variété, de la douceur la plus subtile aux coups d’éclat les plus héroïques ! Bezuidenhout y déploie un sens de l’articulation et du discours jusque dans d’impressionnantes cadences semi-improvisées.

Comme dans les précédents volumes, l’orchestre appelle quelques réserves. Si le Freiburger Barockorchester affiche une cohésion, une transparence de texture déjà saluées (cf. nos 688 et 692), sa vivacité d’accent n’évite pas toujours une certaine brusquerie. Pablo Heras-Casado veille aux équilibres, donnant à la pâte d’ensemble l’épaisseur symphonique que réclament certains passages (introduction du no 3, par exemple) ou conférant un relief adéquat à tel solo de basson, tel trait des cors, telle ligne de flûte ou de hautbois, mais sa lecture semble souvent se limiter à une succession d’idées sans trop de vision.

Wissâm Feuillet

Concertos pour piano n° 4 et op. 61a (transcription du Concerto pour violon).

Nino Gvetadze (piano), Phion, Orchestra of Gelderland and Overijssel, Benjamin Levy.

Challenge. Ø 2021. TT : 1 h 13’.

TECHNIQUE : 4/5

Bien peu d’enregistrements du Concerto pour piano n° 4 de Beethoven sont aussi difficiles à caractériser que celui-ci. Lauréate du Concours Franz Liszt 2008 de Budapest, Nino Gvetadze y déploie un jeu fermement articulé, jamais perlé. Elle ne vise pas la fluidité à tout prix, ne plastronne nulle part et renonce à toute langueur. D’ailleurs, lorsque la tentation hédoniste se présente, on la sent imperceptiblement se raidir. Bien malin qui pourrait dire ce qui l’emporte chez la pianiste géorgienne, la volonté de clarté ou le besoin de liberté. Pris dans un tempo allant, l’Allegro moderato regarde davantage vers Dussek que vers Schumann. A la tête d’une formation née, en 2019, de la fusion du Philharmonique d’Arnhem et de l’Orkest van het Oosten d’Enschede, le chef français Benjamin Levy adopte les codes du mouvement historiquement informé : le jeu non vibrato des cordes (10/8/6/5/3) et, de manière générale, la volonté d’aiguiser le discours réduisent la majesté de l’œuvre au profit d’une saine vivacité… dont le souffle un peu court tend cependant à uniformiser le propos. Malgré le staccato marqué de l’Andante con moto, le qui-vive revendiqué des mouvements extrêmes, cette rhétorique montre plus qu’elle ne raconte, et de manière parfois décousue. L’impression fréquente de se trouver devant un catalogue d’idées glanées à droite et à gauche persiste dans la transcription du concerto pour violon. La brillance légèrement cuivrée du piano (à cordes parallèles) de Chris Maene sera, elle, affaire de goût.

Hugues Mousseau

GIOVANNI BONONCINI

1670-1747

ANTONIO MARIA BONONCINI

1677-1726

Sonates pour violoncelle et basse continue.

Marco Ceccato (violoncelle et direction), Academia Ottoboni.

Alpha. Ø 2020. TT : 58’.

TECHNIQUE : 4/5

Dans la famille Bononcini, on demande les deux frères : Giovanni et Antonio Maria. Mieux connus aujourd’hui pour leur musique vocale, ils furent l’un et l’autre de grands virtuoses du violoncelle. Ils vont plus loin que la génération qui les précède dans l’affirmation de l’écriture soliste (Domenico Gabrielli et Giuseppe Maria Jacchini, pour ne citer qu’eux) tout en s’exprimant dans l’idiome à la mode : le style galant, ce langage extrêmement mélodique et raffiné, riche en ornements, que l’on retrouve dans les sonates pour violoncelle de Vivaldi. Le Cantabile de La Comodina ou celui de la Sonate en ut mineur sont à cet égard on ne peut plus parlants !

Saluée jadis chez Boccherini (Diapason d’or de l’année 2015), l’Academia Ottoboni rend pleinement justice à ce programme qui dévoile deux sonates inédites : le petit ensemble, cohérent et énergique, empoigne ce répertoire avec gaîté et sait y insuffler çà et là de la théâtralité. L’archet volubile de Marco Ceccato chante avec aisance et fermeté. Dans le continuo, Rebeca Ferri assure une ligne de basse lisible, bien présente, ancrée dans la corde, l’archiluth de Simone Vallerotonda est inventif sans sortir de son rôle d’accompagnateur, s’intercalant judicieusement entre le violoncelle et les claviers, sobres, d’Anna Fontana. Cette heureuse combinaison atteint une belle profondeur dans l’Adagio de la Sonata IVa d’Antonio Maria. Remarquable dans les mouvements lents, l’ensemble gagnerait à plus de propreté dans l’accroche de la corde lorsque les dynamiques se font plus vives.

Wissâm Feuillet

JOHANNES BRAHMS

1833-1897

Les trois quatuors à cordes. Quintette op. 111*.

Quatuor Dudok, Lilli Maijala (alto)*.

Rubicon (2 CD). Ø 2020 et 2021.

TT : 2 h 09’.

TECHNIQUE : 4/5

Renouveler l’interprétation des quatuors à cordes) et celle des Belcea (Alpha, ). Jeune ensemble néerlandais remarqué au Concours de Bordeaux 2013, le Quatuor Dudok se lance dans l’aventure, fort de nombreux atouts : une solide expérience des classiques du XX siècle, un jeu raffiné et, bien que parfois abrupt, amoureux des demi-teintes ; une sonorité d’ensemble souple et vive, un sens aigu de la structure et du détail. L’usage de cordes en boyau et d’archets romantiques répond au désir d’aborder la polyphonie et la polyrythmie brahmsiennes comme s’il s’agissait de créations neuves et radicales.

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