L’HOMME qui voulait SE FAIRE aimer
En cinq ans, on l’a vu se faire siffler, insulter, et même gifler. Et pourtant : Emmanuel Macron continue de chercher le contact avec la foule, comme si sa présence et ses mots pouvaient apaiser les colères. Que révèle ce dialogue impossible ? Arthur Cerf s’est posé la question en retrouvant celles et ceux qui ont l’ont interpellé.
Euh pardon, Macron passe en ville? Un samedi soir de janvier 2022, à Saorge, dans les Alpes-Maritimes, Justyna interrompt la partie de jeu de société entre amis. Oui, elle a bien entendu et elle est un peu surprise: le président de la République ose venir, en chair et en os ? Justyna a 43 ans, elle est polonaise, installée en France depuis 14 ans et travaille comme ouvrière agricole dans le bio. La politique, elle s’en fiche. Macron, elle ne saurait pas bien dire si elle le trouve bon ou mauvais. Mais qu’il veuille « emmerder » les non-vaccinés, dont elle fait partie, ça ne passe pas, mais alors pas du tout. Tiens, d’ailleurs, elle ira le lui dire !
Lundi 10 janvier 2022, la voilà en route pour Tende, à trente minutes de voiture, décidée à lui exprimer le fond de sa pensée. Sur place, autant de public que de forces de l’ordre. Pas si vite. La sécurité lui confisque le bout de carton sur lequel elle compte écrire à la dernière minute. Elle patiente dans le froid avec ses amies, réfléchit et griffonne son message au creux de ses mains. Le voilà qui approche. Elle écarte ses paumes : « Je t’emmerde. » Un silence, le temps que le chef de l’État comprenne le message. Il lit et semble rire derrière son masque : « Merci, c’est gentil, répond-il. Bon courage, et protégez-vous surtout. » Justyna peut rentrer à Saorge, avec le sentiment du devoir accompli. « Je ne l’ai pas insulté, m’assure-t-elle une semaine plus tard, étonnée par notre appel, j’ai juste utilisé son langage. »
C’est une scène de Macronie ordinaire. Une dame emmerde le président, le président emmerde cette dame, et personne ne s’en étonne. Les JT se sont dispensés de l’image, les chaînes d’infos n’en ont pas fait un flash et même les réseaux sociaux n’en ont pas parlé. En cinq ans, le président n’a pas chômé : un jour, il dit à un jeune horticulteur qu’il n’a qu’à traverser la rue pour trouver du travail ; un autre, il pose avec un jeune de Saint-Martin, torse nu et majeur en l’air; encore après, il se fait gifler par un allumé dans la Drôme. Saisissantes, troublantes, inquiétantes, absurdes ou drôles : ces images font partie de ce que l’on retiendra du quinquennat. Dans ces moments de
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