Féministe ta mère
« Parfois, mon fils tape. Toutes ses frustrations d’enfant se collent dans ses petits poings serrés et il tape. Pas fort, pas souvent, mais dans ces moments-là, il me rend dingue. Cela dit, moins que Les raccourcis maternels sont toujours saisissants… Leurs développements aussi: Le bec momentanément cloué, je réfléchis… Si mon fils était une fille, l’empêcherais-je de taper? Oui, certainement. M’en inquiéterais-je autant? Non, évidemment. Parce que l’école, je le sais, viendrait en renfort pour lui apprendre à canaliser ses émotions de gamine – et, accessoirement, à occuper le moins d’espace visuel, sonore et physique possible. La colère de mon fils, elle, sera officiellement réprimandée… Tout en bénéficiant, au fond, d’une certaine indulgence: cet afflux de testostérone ne serait-il pas le signe d’une virilité qui pointe le bout de son nez? Naturelle, voire (bio)logique, peu importe, alors, qu’elle soit toxique: les adultes souriront, hausseront les épaules, tourneront les talons. À moi, à la maison, d’expliquer à mon fils que la violence n’est jamais justifiée; que oui, il peut avoir de très très gros muscles et faire très, très mal, mais que ça n’a aucun intérêt; qu’il peut, au contraire, être un homme et avoir le droit de pleurer… La possibilité d’un monde d’après #MeToo, débarrassé de ces réflexes archaïques de domination, se joue là: l’éducation des petits garçons, la construction des hommes de demain. Mais comment le faire seule, quand tout, autour, continue d’encourager cette vieille idée d’un masculin tout en force? Comment l’élever sans le dresser? Comment résister à ne jamais, jamais, jamais lui acheter un pistolet, sans verser dans un dogmatisme tout aussi étouffant? La tâche est délicate. Le chantier, gigantesque. Même ma mère finit par le reconnaître: J’ai failli lui rappeler qu’un enfant, souvent, était aussi élevé par un père, mais j’avais faim. Il fallait bien déjeuner. »
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