Rock and Folk

Rééditions du mois

Serge Gainsbourg

“HISTOIRE DE MELODY NELSON”

Mercury/Universal

Sept morceaux, vingt-huit minutes et deux secondes. On ne connaît rien d’aussi fort et d’aussi court. Un chef-d’oeuvre: “Histoire De Melody Nelson”, sorti le 24 mars 1971. L’album mythique a été réédité à maintes reprises, dans toutes les versions possibles. Et voici qu’à nouveau, il réapparaît, en version “Dolby Atmos”, un nouveau procédé auquel personne ne comprend rien. Forcément, le client est méfiant. Quelle est cette nouvelle entourloupe ? Une fois le disque glissé dans la platine, c’est une hallucination: “Histoire De Melody Nelson” n’a jamais sonné comme ça. Les détails, les instruments, les cordes, tout saute aux oreilles, y compris la voix de Serge Gainsbourg mixée trop en avant dès la version originale, mais qu’importe: c’est mieux que les remix de John Lennon ou George Harrison, car ce n’est précisément pas du remix. Dans les enceintes — l’option MP3 est interdite. Des séances, organisées par l’arrangeur génial, se sont tenues à Londres. Vannier s’embrouille un peu en ce qui concerne les musiciens, et cite Gainsbourg: Il apparaît que Flowers (“Walk On The Wild Side”) n’a jamais joué ces parties de basse mythiques vénérées par Bertrand Burgalat , Air et tant d’autres. En réalité, il s’agissait de Dave Richmond, qui avait déjà joué la fameuse partie de basse de “69 Année Erotique”, et qui signe ici ces machins insensés avec une basse Burns Black Bison dont les cordes ont des filets plats. Le guitariste est Alan Parker. Pour la batterie, personne ne sait: il semble que plusieurs aient défilé dans les studios. Sur la pochette initiale de l’album, générosité oblige, personne n’est crédité. Gainsbourg a finalement apporté ses textes inspirés de “Lolita” et de Heredia, pour raconter cette histoire d’amour pas très #MeToo entre un homme mûr et une fille de quinze ans. Il est au sommet de son écriture, après “Initials BB” et “Jane Birkin-Serge Gainsbourg”. Ses paroles sont grandioses, loin des facilités et des jeux de mots minables qui suivront par la suite. Les perles s’enfilent: “Valse De Melody” , et son pont sublime etc.). En dehors de cela, le thème musical récurrent ressemble à la suite d’accords de “Through My Eyes” des Creation, que nous lui avions fait écouter chez lui, rue de Verneuil, pour en souligner les similarités. De toute évidence, il ne l’avait jamais entendu. Les coïncidences musicales existent. Ses textes sont insurpassables sur tous les titres (sauf pour “En Melody”, morceau assez embarrassant, sur lequel Jane Birkin, la fameuse Melody, glousse et jouit pendant le coït supposé avec son aîné), mais en particulier sur “Melody”, “L’Hôtel Particulier” et “Cargo Culte”, qui signe la mort de Melody en Mélanésie, là où avait lieu le culte du Cargo (les avions étaient des divinités qui parfois s’écrasaient pour laisser des offrandes bienvenues). Mais surtout, il y a le génie de Vannier: Elles surgissent puis disparaissent comme des aurores boréales, et n’en finissent plus de fasciner (autant en parler à Beck pour l’un de ses plus beaux albums, “Sea Change”, sur lequel il ne s’est pas privé, en tout respect, de reprendre et valoriser le travail de Vannier). Sans parler de sa gestion des choeurs. Cette merveille ressort avec un CD de prises alternatives et un DVD avec un documentaire bénéficiant des participations de Jane et Andrew Birkin, de Jean-Claude Vannier et de l’ingénieur du son brillant, Jean-Claude Charvier, ainsi que du photographe Tony Frank.

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