Un accident de la vie

L’existence de Laurie est réglée comme du papier à musique. Elle se lève à sept heures du matin, fait son jogging le long de la plage, avant de rentrer chez elle et de se préparer. C’est elle qui ouvre l’agence immobilière qu’elle a créée en début d’année. Elle est encore tout émue de lever le store qui dévoile une vitrine qu’elle enrichit chaque jour avec de nouvelles annonces. La jeune femme cible une clientèle composée pour l’essentiel de propriétaires de résidences secondaires. Ses affaires se portent plutôt bien, comme en témoigne sa boîte vocale surchargée de messages. Et pourtant, depuis le week-end dernier, elle a du mal à trouver le sommeil.

– Bonjour Laurie ! Comment vas-tu ?

Le jeune homme qui entre dans l’agence d’une démarche souple n’a pas son pareil pour redonner le sourire à Laurie. Mais aujourd’hui, Valentin ne reçoit, en guise de réponse, qu’un bref hochement de tête. Il en est peiné mais il n’en montre rien. Il se dit que sa patronne a la tête ailleurs ou un problème à régler. Elle a d’ailleurs une mine contrariée, comme si elle manquait de sommeil. Cela le chagrine d’autant plus qu’il est normalement là pour l’aider. Quand Laurie l’a recruté, elle lui a dit : – Valentin, tu seras mon bras droit ! J’ai besoin de quelqu’un de compétent et de dynamique.

Puis, après quelques jours seulement, elle avait affirmé :

– J’ai bien l’impression d’avoir trouvé la perle rare !

C’était il y a trois mois. Et l’impression favorable créée par Valentin ne s’est pas démentie, jusqu’à ces derniers jours… Jusqu’au week-end dernier, précisément.

Laurie pénètre dans son bureau et ferme la porte derrière elle. Cela non plus n’est pas dans ses habitudes. Elle semble plus préoccupée qu’à l’ordinaire. Son premier geste est de saisir le téléphone en tournant le dos à la paroi vitrée qui la sépare du bureau de Valentin. Puis elle s’assied, hoche la tête comme si elle prenait des décisions. Elle repose le combiné brusquement et s’empare d’un dossier. Valentin se remet