LE COLLECTION NEUR
—Sur Zoom, Kim Jones, le directeur artistique de Dior Homme, est installé devant une profusion de livres, méticuleusement rangés sur des étagères métalliques. Il se rue vers l’un d’eux, pour l’exhiber devant la caméra. Le volume, relié cuir, est imposant : une édition originale d’Orlando, de Virginia Woolf. « Regardez, dit Kim Jones, l’ouvrant sur la page de dédicace. “À Vita, de la part de Virginia. Lundi 11 octobre 1928.” » « Vita », c’est Vita Sackville–West, écrivaine, amante de Virginia Woolf et inspiratrice d’Orlando, le roman culte dans lequel un poète voyage à travers les siècles, changeant de sexe pour se réveiller femme. Kim Jones a fait l’acquisition de la plupart des cadeaux de Virginia à Vita. « Ceux–là, ils sont tous de Virginia », dit–il, indiquant une rangée de livres à reliure rouge derrière lui. « Et ceux–là, ajoute–t–il, désignant une rangée de livres bleus, ce sont ceux de la Hogarth Press. » Soit la maison d’édition créée par Virginia et son mari Leonard pour publier les livres du Bloomsbury Group, lequel rassemblait, aux côtés des Woolf, des auteurs, des intellectuels et des artistes anglais comme Duncan Grant, Vanessa Bell ou John Maynard Keynes. Au–dessus s’alignent d’autres livres précieux, des ouvrages d’Allen Ginsberg et de différents poètes de la Beat Generation. En dessous, on remarque plusieurs exemplaires rares de L’Origine des espèces de Charles Darwin.
Kim Jones est un collectionneur. C’est chez lui instinctif, obsessionnel. Il a fait la collection de livres. Il a fait la collection d’oeuvres d’art. Il collectionne aussi des babioles en lien avec le sujet de ses collections : des lettres, des photographies, des catalogues de vente. Au fil des années, dans ses différentes maisons de Paris et de Londres, dans ses bureaux chez Louis Vuitton — où il a dirigé la ligne homme de 2011 à 2018 —, et aujourd’hui chez Dior, il a accumulé des quantités de cartons et des kyrielles de portants accueillant une infinité de vêtements allant
