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livres

Poupoule intime

Francis Poulenc, Lettres inédites à Brigitte Manceaux. Orizons, 443 p., 27 €.

De quinze ans sa cadette, Brigitte Manceaux est pour l’oncle Francis bien plus que sa nièce, sa confidente et – quasiment – son assistante. Poulenc la charge d’organiser son quotidien (encaisser les chèques, découper et collecter les articles de presse, expédier telle partition, réserver les billets de train, acheter des cadeaux, etc.), mais sollicite également ses compétences musicales. Eduquée par Marguerite Long et Claire Croiza, « Brige » lui fait travailler son en jouant elle-même la partie d’orchestre, elle prend part à la genèse, les y trouvent de nouveaux éclairages. Car Poulenc lui déballe tout et les 192 lettres pieusement conservées dessinent de lui un portrait sans filtre. Tout? Presque : Brigitte ne découvrira qu’à l’ouverture du testament l’existence de la fille de son oncle chéri. Coup de poignard auquel elle ne survivra que trois mois. Est-ce Poulenc qui retrancha de ses propres missives les passages qui concernaient la vie amoureuse, énigmatique, de sa « Biche chérie »? Nous ne le saurons jamais. Des amours de Poupoule, longues, fugaces, parallèles ou croisées, nous n’ignorons en revanche plus grand-chose grâce aux notes érudites et aux investigations de Pierre Miscevic, iconographie à l’appui. Les rares lettres déjà connues sont pour la première fois présentées sans coupes ni censure. Drôle, parfois féroce, l’oncle indigne s’amuse souvent à complimenter et moquer un « caractère» dans une même phrase. Qui aime bien châtie bien : Charles Munch, Jean Françaix, Pierre Boulez, Denise Duval, Henri Sauguet en font les frais au fil du volume, parmi bien d’autres… Il sait mettre le doigt, sans en avoir l’air, sur les petits travers des uns ou des autres! Tant pis pour la cupidité de Marguerite Long « qui connaît [telle] fortune à mille francs près », la nymphomanie de Nora Auric, l’incuriosité de Marcel Delannoy dont l’agace le « s’il y a des fautes dans mon matériel, on dira que c’est dodécaphonique ». Car Poulenc vit avec son temps, en commente les soubresauts. Le voici bouleversé par la rupture du barrage de Malpasset ou par le phénomène Edith Piaf (« de ce petit cadavre sort une voix formidable »). Un jour « jeune et beau!!!!! Si tu savais comme nous rions avec Denise », le lendemain morose « dans le style milliardaire mélancolique », ou atrabilaire maudissant « les jambes poilues [et les] nichons pendants ». Poulenc vivant.

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