Vogue Hommes

ENVIE DE CHANGER LE MONDE

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Quel a été l’impact du virus et de cette période sur vous ?

PAUL B. PRECIADO C’était une expérience importante. Je suis tombé malade très rapidement, avec une forte fièvre, et j’ai perdu la vision de l’oeil gauche pendant quelques jours à cause d’une inflammation du nerf optique. J’ai passé la maladie seul et j’ai compris que je pouvais mourir et que personne ne pourrait venir me voir. Jusqu’à présent, j’ai beaucoup voyagé et, bien que je travaille sur la politique du corps, je vivais toujours au–dessus de mes moyens physiques et corporels. Le virus m’a connecté à ma propre vulnérabilité et, plus généralement, à la vulnérabilité dans laquelle notre propre mode de vie capitaliste, patriarcal et colonial nous a placés.

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Pensez–vous que le confinement a vraiment changé notre façon de penser, d’appréhender nos existences, notre façon de vivre, nos valeurs ?

Ou peut–on craindre que cela ne soit que superficiel et que tout recommence comme avant ?

Je pense que le virus n’a pas seulement déclenché une crise sanitaire, économique ou politique. Il a aussi produit une crise esthétique, c’est–à–dire la transformation de nos manières de percevoir le monde et de ressentir. D’une part, nous avons vu qu’il est possible d’« arrêter », de « stopper » le délire de la production et de la consommation capitalistes. Nous vivions dans une situation de naturalisation de l’exploitation néolibérale : la destruction capitaliste de la planète nous est présentée comme un fait naturel contre lequel les politiciens ne pouvaient pas agir. La première chose que fait le dispositif capitaliste est d’extraire notre capacité à désirer, de sorte que nous devenons des sujets dociles, semi–dépressifs, qui ne vivent que pour la production et la consommation. Avec la crise du

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