À SON CORPS BATTANT
Le 17 novembre 2019, Paul B. Preciado est invité au Palais des congrès de Paris pour prendre la parole devant 3500 psychanalystes réunis lors des journées internationales de l’École de la cause freudienne, une association psychanalytique fondée en janvier 1981 par Jacques Lacan. Le thème du colloque est: « Femmes en psychanalyse ». Le témoignage de Paul B. est attendu: « J’ai vécu comme femme jusqu’à atteindre 38 ans », annonce-t-il au public. Dix ans plus tôt, cultivant un look androgyne, Beatriz Preciado arborait une moustache postiche et prenait de la testostérone synthétique. Pas pour devenir un homme: « Cela ne m’intéresse pas », confiait-elle à Libération en 2008, à l’occasion de la sortie de Testo Junkie, un essai de philosophie transgenre dans lequel elle se déclarait tout de go « gouine trans ». C’est-à-dire « personne de genre non-binaire », précise Preciado au début de son laïus. Si Beatriz s’enduisait à l’époque la peau de testostérone, c’était pour ressentir l’effet psycho-actif que produit cette hormone stéroïdienne lors d’un rapport sexuel avec une femme.
ROMPRE AVEC LE DISCOURS UNIVERSITAIRE
poursuit Preciado, dont le témoignage tourne à la confession. Née en 1970, àDevenue boursière à Madrid chez les Jésuites de l’Opus Dei, elle médite sur Ignace de Loyola le jour et s’éclate dans les boîtes de travestis la nuit. En 1992, elle s’envole pour New York. Étudiante à la New School University, elle suit les cours de l’apologue de la dissidence, Agnès Heller, et du pape du déconstructivisme, Jacques Derrida. Une autre star de la la passionne : Michel Foucault, dont la théorie du bio-pouvoir et son obsession pour la conversion disciplinaire des corps doivent autant aux heures studieuses passées sous la voûte de la Bibliothèque nationale qu’à sa conversion dans les années 1975 au sado-masochisme et à la prise de LSD avec ses collègues de l’université de Californie de Berkeley.
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