LESUNSSE LAMENTENT d’un supposé déclin occidental. Les autres estiment que les réussites scientifiques et économiques de notre temps suffisent à en décréter la perfection. Et tous soutiennent que nous vivons, pour le meilleur ou pour le pire, une « accélération du monde » ou encore une « révolution numérique ». Dans ce contexte, la thèse de l’éditorialiste au New York Times Ross Douthat, dans Bienvenue dans la décadence (Presses de la cité/Perrin), pourra sembler provocatrice. Elle s’avère surtout fort convaincante. Economie, technologie, politique, idéologie, culture même, les Occidentaux sont gâtés, mais aussi embourbés, montre-t-il, dans la stagnation, la virtualité et la répétition. Ni l’enfer ni le paradis, mais les limbes. Dans ce livre rempli de références à la culture savante autant que populaire, cet esprit fin, conservateur modéré, retrace les évolutions des cinquante dernières années et s’interroge : sortira- t-on un jour de la nasse, et si oui, sera-ce par la catastrophe ou le sursaut ? Entretien exclusif.
Depuis Apollo, nous sommes entrés en décadence, écrivez-vous… Qu’est-ce qui vous fait penser cela ?
J’utilise le programme Apollo par commodité, comme borne temporelle, mais il est vrai que cet événement est corrélé avec un grand nombre de tendances décrites dans le livre. La décadence, selon moi, est un phénomène pluriel. Dans les années 1970, on commence à constater un ralentissement de la croissance