Vanity Fair France

AGENT provocateur

PORTRAIT

Un jeudi gris de janvier, à Londres, dans un quartier ni branché ni très vivant de l’est de la capitale anglaise. Jonathan Anderson, le directeur artistique de la marque JW Anderson et de la maison Loewe, cale son aimable silhouette de jeune premier dans un fauteuil, se verse un café dans sa tasse fétiche (une Cornishware rayée bleu et blanc) et lâche son téléphone sur lequel pas une fois, en deux heures, il ne posera son regard couleur jean délavé. Il s’est reposé quelques jours dans la maison de campagne qu’il possède dans le Norfolk, et il a la conversation facile et intéressante, fidèle à sa réputation d’avoir « du texte ». Il ne pourrait être plus éloigné de l’idée que les gens se font d’un designer de mode, cette créature caractérielle et écervelée. Par exemple, alors qu’on apprenait tous à faire du pain au levain, il a profité du Covid pour lire Keynes et d’autres ouvrages d’économie. « J’aime la mode, mais je ne la laisserai pas dicter ma vie », affirme-t-il. Sa personnalité avant-gardiste s’exprime dans des vêtements souvent étranges et toujours poétiques, échappant à toute « tendance » et qu’on a tout de suite envie de porter. S’il porte indubitablement son empreinte, son style résiste à toute tentative de mise en formule, pour une simple raison : « Dès qu’un look passe sur le podium, je ne veux plus le voir, c’est terminé, me dit-il levant les yeux au ciel. Parce que je suis sûr qu’il y a toujours quelque chose de nouveau et de mieux qui arrive. D’un point de vue commercial, c’est sûrement un défaut. » L’année qu’il vient de passer tend à prouver le contraire.

Il n’a pas encore 40 ans et aussi. Il semble associé à bien des « it » looks du moment, et ça n’est pas qu’une impression : cet été, Loewe a pris la tête du classement de la plateforme de recherches Lyst, qui répertorie les pièces les plus demandées, devant tous les mastodontes du marché. La griffe espagnole, sous pavillon LVMH, dont personne n’était capable de prononcer le nom il y a cinq minutes (pour info, c’est « loévé »), a gagné treize places en un an, et JW Anderson, la marque que Jonathan Anderson a fondée en 2005, intègre pour la première fois le Top 20.

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