Au bord de la Sarthe, les moines bénédictins nous ont ouvert les portes de leur abbaye
Sept fois par jour, ils se retrouvent pour chanter selon les principes du grégorien, cette mélodie sacrée conçue pour élever l’âme vers Dieu, dont les bénédictins de Solesmes sont les grands perpétuateurs. Mais le travail manuel est aussi au cœur de leur vie. Cordonnier, menuisier, relieur, maraîcher… chacun contribue selon ses compétences à l’économie de la congrégation.
Aux antipodes de la frénésie extérieure, la communauté monastique vit au rythme d’un quotidien immuable
« Les jeunes moines viennent du monde numérique. Quel courage de quitter ces rivages consuméristes pour entrer dans une abbaye ! »
le père abbé Kemlin
Par Nicolas Diat
Longtemps, ils ont passé Noël en famille. Que pouvaient-ils imaginer de plus beau que la douceur rassurante de leurs proches réunis ? Ils entendaient les voix joyeuses d’un réveillon, les chuchotements des enfants, les pas qui se pressent pour la messe de la nuit. Désormais ils habitent entre des murs silencieux, appartiennent à une communauté, portent l’habit noir traditionnel des bénédictins. N’y a-t-il pas là quelque folie ? Que s’est-il passé dans ces vies rangées ? Pourquoi un choix si radical qui semble en apparence contrarier le cours évident du bonheur ?
Un monastère est un mystère. On ne parvient jamais à comprendre les raisons des moines ; Dieu seul les sait. Personne ne peut entrer dans le dialogue intime qui se noue entre celui qui a donné sa vie et son Père.
L’histoire prestigieuse de l’abbaye de Solesmes ne rend pas ce secret moins hermétique. On peut y admirer la patine du temps sur les pierres grises, se laisser envelopper par le grand silence de la nuit après les complies, imaginer la vie des anciens moines lors d’une promenade dans le petit cimetière qui jouxte l’abbatiale. Souvent les pèlerins restent bouche bée devant la beauté des messes solennelles, des vêpres, des grandes fêtes. Le moine solesmien est un « Homo liturgicus ». Mais, dans ce
