Quelle a été la cause principale de la Seconde Guerre mondiale? À cette question épineuse et si sensible, nombre d’analystes, depuis l’économiste John Maynard Keynes, ont répondu en chœur : le traité de Versailles. La responsabilité incomberait à l’humiliant « diktat» imposé par les Alliés – en premier lieu la France. Leur intransigeance aurait creusé les sillons dans lesquels Hitler a planté les mauvaises graines de la revanche, comme le proclame Konstantin von Neurath, ex-serviteur du IIIe Reich, lors de son procès à Nuremberg en 1946: « Il faut chercher dans les stipulations insensées et impossibles du traité de Versailles, qui ont eu pour effet d’amener le désordre dans l’économie du monde entier, les racines du national-socialisme et également les origines de la Seconde Guerre mondiale. » Ce jugement a été par la suite repris et répété si souvent, notamment par une grande partie de l’historiographie anglo-saxonne, qu’il semble se suffire à luimême sans plus d’explications ni examen critique des liens de causalité. Or la réalité est très loin d’être aussi évidente.
Certes, comme l’ont souligné divers historiens et économistes depuis plusieurs décennies, le traité signé par les puissances à Versailles en juin 1919 paraît brutal pour l’Allemagne vaincue. Il comporte d’abord des clauses territoriales lourdes, coupant le pays en deux par le corridor de Dantzig et lui faisant perdre la totalité de son empire colonial. Les clauses militaires sont tout aussi radicales : l’armée.