Les livres d’entretiens avec des musiciens sont rares. D’abord parce qu’ils ne se vendent pas, ensuite parce qu’ils n’ont souvent aucun intérêt. Une exception confirme la règle : Foi, espérance et carnage, dans lequel le journaliste irlandais Sean O’Hagan, vieil ami de Nick Cave, condense des interviews d’une rare intensité. Au moment de la conception de ce livre, Nick Cave et sa femme survivaient péniblement à la disparition de l’un de leurs fils. L’auteur-compositeur génial, dont le mode de vie quelques années auparavant n’est pas franchement un exemple pour les jeunesses, s’y livre de manière inédite. Le résultat est un chefd’œuvre. Un livre formidable sur un musicien, car O’Hagan est un grand journaliste qui connaît l’œuvre de son sujet sur le bout des doigts, mais aussi, un manuel de survie capable d’intéresser tous ceux qui ont connu une expérience traumatisante. Un an après sa sortie triomphalement accueillie en Grande-Bretagne, le livre arrive en France. Ceux qui le liront ne sont pas prêts de l’oublier.
Nick Cave, c’est un parcours extraordinaire. Celui d’un Australien né en 1957 qui, dès la fin des années 1970, s’est retrouvé fasciné par la scène Birthday Party, avec de nouveaux musiciens, c’est désormais l’heure de Nick Cave and the Bad Seeds. La nouvelle formation réside à Berlin-Ouest – on la voit dans de Wim Wenders. Les débuts des Bad Seeds sont assez radicaux : le chanteur et sa troupe donnent une version post-punk du blues primitif d’avant-guerre, un genre méprisé à l’époque à l’exception du Gun Club plus tard pastiché par Noir Désir. Puis, peu à peu, Cave apprend à écrire des chansons. Ce n’est pas un grand chanteur, mais il parvient à s’améliorer. (1988) est sa première grande réussite. Les années qui suivent le feront passer du statut d’artiste culte à celui de star. Durant une bonne partie des années 1990, les obsessions du musicien rejailliront dans ses paroles. Cave chante le diable, la mort, le meurtre (l’un de ses albums est intitulé ), l’amour, la folie, et l’histoire d’un tueur qui va bientôt griller sur la chaise électrique ( plus tard repris par Johnny Cash en personne).