I LE SOURCIL BROUSSAILLEUX vous regardait de haut, l’oeil avait un fond de tristesse. Celle de ne pas réussir à vous convaincre d’une évidence pourtant cruciale : les sociétés humaines sont bâties sur un meurtre – celui du bouc émissaire –, qui seul nous protège d’une violence plus grande à laquelle est vouée l’humanité. Car au commencement est le désir d’imiter d’autrui, source de tous les conflits. Cette vérité, l’universitaire René Girard (1961). La souplesse venant rarement avec l’âge, Girard vit des confirmations de sa théorie dans tout ce qu’il lisait (sauf peut-être dans les livres de cuisine de Ginette Mathiot), assumant au soir de sa vie des thèses apocalyptiques aux accents néoconservateurs et fondamentalistes : le Christ ou le chaos. Comme tous les antimodernes, il préférait les péchés du passé à notre gabegie actuelle : certes, le bouc émissaire n’avait pas de bol (que cela tombât sur lui), mais au moins limitait-il la casse – contrairement à notre civilisation woke qui excite l’envie.
René Girard : le retour d’Idéfix
Sep 14, 2023
3 minutes
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