Sous le soleil exactement, un couple prend la pose. Au bord du rivage, elle porte un body fuchsia, un jean pattes d’eph bleu clair et des boots. Elle a les cheveux longs, une frange battue par la brise. Son sourire est franc, éblouissant. L’homme qui lui tient la taille a revêtu un blouson en cuir de motard sur un T-shirt blanc et un Levi’s. Autour de son cou pend un trousseau de clés ; au bout d’une laisse, il tient un bull-terrier. Sa coupe de cheveux est désordonnée, sa barbe n’est pas rasée. Il fume, en esquissant un sourire narquois. Son teint blafard révèle qu’il ne doit pas passer beaucoup de temps à la plage. Le seul indice qu’il est en vacances : la paire d’espadrilles bleu marine à ses pieds. Derrière l’appareil photo qui fixe la scène, il y a Charles Bébert, le « chasseur d’images » le plus connu de la Riviera, le mieux introduit dans le show-biz, celui qui chaque soir rapporte ce qu’il a vu dans l’émission « Quoi de neuf sur la Côte selon Charles Bébert », diffusée sur Télé Monte-Carlo.
En cet été 1972, les deux tourtereaux ont donné rendez-vous à Charles Bébert au Negresco, à Nice. Puis le photographe les a entraînés sur la plage Neptune, où les badauds reconnaissent sans doute. Un hit planétaire banni par le Vatican, ce qui a ravi son auteur. Clic clac. La photo est dans la boîte et restera dans les archives de Charles Bébert avant de ressurgir cinquante ans plus tard. Que raconte-t-elle de ses sujets ? Est-elle seulement le témoignage d’un amour étincelant ou révèle-t-elle d’autres vérités ? Depuis la publication de l’album qui scella leur union un an seulement après leur rencontre sur le tournage du film en 1968, le couple traverse des turbulences, comme s’il courait après un succès qui lui filait chaque fois entre les doigts. Abonnée aux rôles de nunuche sexy dans de sombres nanars, Jane Birkin rêve d’un film qui fasse décoller sa carrière d’actrice vers d’autres cieux. Mais la naissance de Charlotte, le 20 juillet 1971, a changé la donne : adieu les plateaux, bonjour les couches.