En quête de la mère morte
Il est toujours Intéressant de regarder un auteur passer du récit à la fiction: cela permet de mesurer ce qu'il gagne ou perd dans ce saut magistral récit du fait divers qui avait dévasté sa famille. Alors nous avons sauté sur ce Garçon du dehors, son premier roman tout juste traduit, même s'il parle de la vie des (les nomades irlandais), à la fin des années 1950, sujet qui n'est pas notre obsession première. Et nous ne sommes pas tombés dans le vide. D'abord parce que Cummins y manifeste assez de talent pour confier sans dommage sa narration à un enfant: Christy, 11 ans, dont la famille sillonne l'Irlande en vivant de petits boulots, de petit commerce, et, quand ceux-ci manquent, de petits larcins et de mendicité, Christy qui encourage son cousin à brûler la caravane où vient de mourir leur grand-père pour lui éviter l'enfermement d'un cercueil. Christy qui, sur une photo ancienne, découvre le visage de sa mère qu'il croit morte, et dont son père a toujours refusé de lui parler. Christy qui cherche désespérément à en savoir plus… Qu'est-ce qu'un bon premier roman? C'est une première tentative dont les qualités font oublier les défauts, ici, on retiendra la superbe création d'une voix enfantine, tour de magie qui nous fascine toujours depuis Gary et sa Vie devant soi. On y ajoutera la remarquable restitution du monde des (avec deux , et le refus de romancer tout ça façon de Daniel Guichard. Et on pardonnera volontiers le virage mélodramatique des dernières pages, qui paraissent remontées d'un roman lacrymal du xixesiècle.