Envoyée spécialePhiladelphie (États-Unis)
Kensington, square de la librairie McPherson, dans le nord de Philadelphie. Une femme surgit, Lynn, assez fraîche – elle sort de cure de désintoxication – et annonce la bonne nouvelle. « Eh les gars, y a un type qui file des échantillons. » Et là, c’est la charge de la cavalerie. Même les plus défoncés se relèvent, c’est tout juste si les paralytiques ne se mettent pas à marcher. Adam, qui expliquait il y a encore cinq minutes qu’il allait suivre sa copine en « désintox », « sinon aucun intérêt qu’elle le fasse toute seule dans son coin », oublie toutes ses bonnes résolutions et se dirige à grandes enjambées vers la terre promise. En général, un coin de rue, une allée à l’abri des regards, une entrée d’immeuble ou de maison désertés. On dirait un troupeau de bétail qui part volontairement à l’abattoir.
explique Frank Rodriguez, solide gaillard, ex-dealeur, ex-consommateur et désormais en mission personnelle pour éveiller les consciences sur ce qui se passe dans ce quartier de Philadelphie. Adam revientAdam, lui, raconte qu’il se pique, et le type qui gît sur un fauteuil roulant se contente de fumer. Paroles banales de toxicos, un jour de semaine dans les gorges de l’enfer.