n coup d'œil à la table de ce recueil de nouvelles permet de se faire rapidement une idée de l'univers et du ton de Mariana Enriquez: on tombe d'emblée sur les mots « exhumation », « mirador », « viande », « revenants » Eh oui: les morts ne sont jamais vraiment morts chez Mariana Enriquez, ni les vivants vraiment vivants. D'ailleurs, la grand-tante décédée ne tarde pas d'apparaître à sa petite-nièce, en pleine nuit, sous la forme d'une aimable gamine à moitié décomposée, genre vision de film d'horreur. commente la narratrice, De telles descriptions morbides, il y en a beaucoup dans les douze histoires de ce recueil intitulé qui souvent tournent autour des dérèglements du corps et de l'esprit, de la face sombre et malodorante de nos organes ou de notre psyché, La puanteur est omniprésente, dans les rues d'une Barcelone de SF (« Rambla Triste »), dans les déjections d'un clochard (« Le Caddie »), partout. Le sordide semble être parfois recherché pour lui-même, comme dans « Viande », nouvelle un peu facile sur la fan attitude, qui recourt au thème de la nécrophagie; mais ailleurs, l'auteur parvient à traiter de bizarreries avec une réelle finesse et un sens très aigu de l'étrangeté, comme dans « Où es-tu mon cœur », nouvelle dont la narratrice avoue être excitée sexuellement par… les battements du cœur d'autrui. Paru en 2009, longtemps avant le roman qui a apporté à Mariana Enriquez une reconnaissance internationale, ce recueil grinçant et glauque, comme son prédécesseur actualise et rafraîchit - si l'on ose dire - la veine de la nouvelle horrifique et macabre, avec une pointe de fantastique et de critique sociale.
DANS LES ABÎMES DES ÂMES
Jan 19, 2023
2 minutes
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