Tous les ans, Olivier Gohin, professeur de droit public à Paris-Panthéon-Assas jusqu’à sa retraite en juin 2022, avait pris l’habitude de tenir le même petit discours. Lors de son premier cours de droit constitutionnel, il interpellait directement les jeunes bacheliers serrés dans l’amphithéâtre des premières années, une ancienne chapelle: « Regardez votre voisin de gauche, puis regardez votre voisin de droite. A la fin de l’année, il n’en restera qu’un. » Aux étudiants de deuxième année inscrits dans son cours de droit administratif, ce membre du conseil national d’Oser la France, le microparti de Julien Aubert (droite des Républicains), adressait également un avertissement clair à la fin de sa première fiche de travaux dirigés: « Vous vouliez être à Assas: ça y est, vous y êtes! Prouvez-nous que cela reste mérité. »
Une mise sous pression en 2017: 98 % de taux d’emploi, dont 91 % de cadres après un master en droit. N° 1 de la discipline. Paris II, sa dénomination administrative, se désigne d’ailleurs comme la « première université juridique de France » sur son site Internet. Cette quête de la meilleure réputation a pour pendant une certaine obsession de la perfection. « Assas, c’est marche ou crève », résume Athénaïs Michel, élue de l’association de gauche Assas in Progress. Une autre étudiante raconte qu’une chargée de travaux dirigés lui a refusé une attestation d’absence signée de son employeur en première année. « Elle voulait une attestation du DRH, elle demandait plus de papiers que pour une recherche de logement », se souvient cette diplômée de droit privé, à qui on a aussi demandé un jour le remboursement de sa bourse annuelle, 3 000 euros, parce que l’administration de l’université avait dénoncé par erreur de prétendues absences, alors qu’elle s’était bien présentée en cours.