Chris Millington
Flammarion, 412 p., 25 €
Professeur à l’université de Manchester, Chris Millington enrageait de voir les cerveaux de ses étudiants retournés » des tabloïds. Il lui fallait un vade-mecum pour leur réapprendre l’histoire de la France des années noires. N’en trouvant pas sur le marché anglosaxon, Millington a eu l’heureuse idée en 2020 de combler luimême cette lacune et le résultat est si remarquable qu’il trouve aujourd’hui naturellement sa place dans nos bibliothèques françaises. Pourquoi? D’abord, parce que son approche globale n’ignore pas les terres d’empire mais décentre aussi le regard en métropole pour mieux y saisir le rôle des femmes ou le poids des pesanteurs sociales; ensuite, parce que Chris Millington maîtrise et croise avec bonheur les acquis des littératures française (Semelin, Wieviorka, Jennings) et anglosaxonne (Jackson, Atkin, Vinen); enfin, parce qu’il reste à distance des controverses qu’il présente. Le résultat est une synthèse équilibrée et actualisée, grande fossoyeuse de clichés, clairement organisée (la défaite, Vichy, la Collaboration, la Résistance, les persécutions, la Libération et la mémoire), tout en demeurant plaisante à lire car elle ne se perd ni dans la chronologie, ni dans un récit foisonnant. Pour toutes ces qualités, même si on n’y trouve aucune révélation, elle n’est pas qu’une entrée en matière à cette histoire sombre: elle en apporte également des clés.