BERNARD-HENRI LÉVY AU CŒUR DE L’UKRAINE R SISTANTE ET MARTYRE
Dans la capitale libérée de l’étau, nous espérions un climat de liesse. Mais les rues sont vides, les églises fermées et Maïdan déserte
C’est par train, depuis Lviv, que l’on arrive à
Kiev. Ce sont de gros trains bleus, confortables, plutôt rapides, et qui avaient la réputation, avant la guerre, de partir à l’heure. Mais tout le monde a en tête le bombardement qui a visé, avant-hier [le
9 avril], la gare de Kramatorsk et a fait au moins 52 morts. Alors, les gens font attention. Ils évitent de s’attrouper. Pressent le pas si le quai est éclairé. Et, quand le train s’ébranle, c’est tous feux éteints, chaque compartiment calfeutré et avec, tout au long de la nuit, des arrêts en rase campagne, et des détours, qui font prendre du retard. Très vite, pourtant, on n’y pense plus. Il y a, dans le wagon, des volontaires qui ont mis leur famille à l’abri et retournent au combat. Un soldat qui somnole, sa kalachnikov sans chargeur serrée contre lui comme un bébé. Un Anglais qui vient s’engager dans la Brigade internationale créée par Zelensky. Et des gens qui font le trajet inverse de celui des réfugiés et ont juste décidé, dans la crainte et le tremblement, de retrouver leur ville ou leur village. Que reste-t-il de ma maison? Ont-ils détruit le plafond de faïence jaune et bleue qui a, depuis trois générations, survécu à toutes les catastrophes? Et les porcelaines que j’ai laissées, derrière moi, dans ma fuite? Et ma belle-mère, dont je suis sans nouvelles depuis le jour de l’invasion? Voilà de quoi l’on parle dans le direct Lviv-Kiev qui traverse, comme en rêve, l’Ukraine assaillie. Et voilà ce que l’on entend quand on a la chance d’avoir un bon fixeur: Serguei O., francophone parfait, féru d’Albert Camus et de Michel Houellebecq, qui a l’allure de James
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