Une scène improbable s’est produite durant l’été 1955 dans les forêts du sud du New Hampshire aux États-Unis. Elle a eu lieu à la MacDowell Colony, une maison d’artistes fondée au début du xxe siècle entièrement dédiée à l’épanouissement créatif de ses artistes-résidents, et ce au beau milieu d’un paysage pittoresque entre prairies, chalets rustiques et cottages en pierre.
Cet été-là, le célèbre artiste dadaïste Marcel Duchamp l’a passé à MacDowell. Le peintre américain Milton Avery, un contemporain de Duchamp connu pour ses tableaux abstraits épurés, était également présent. Une décennie plus tard, l’épouse d’Avery, Sally, a rappelé dans une interview avec les Archives d’art américain du Smithsonian que son mari avait enseigné à Duchamp un ensemble de pratiques non négligeables pendant sa résidence à MacDowell. Quelles étaient donc ces pratiques? Était-ce une façon de peindre? Une façon de voir le monde à travers l’art? Ou bien plutôt des conseils bienveillants sur la manière d’aborder les galeries d’art et les musées? Rien de tout cela. expliquait Sally. Elle a ajouté que Duchamp avait dit à son mari : Les résidences d’artistes, et le dépaysement qu’elles procurent, encouragent ceux-ci à créer des liens fortuits, aussi imprévisibles que leur art en lui-même. Parfois ces résidences sont tout bonnement une parenthèse jouissive pour les artistes car, loin de la pression du marché, elles sont le fief d’avancées artistiques majeures ou de progrès essentiels sur une oeuvre d’art en court de réalisation. Fondé en 1907, MacDowell, qui a récemment abandonné son suffixe Colony, est l’une des plus anciennes résidences de ce type. C’est également là-bas que la peintre afro-américaine Faith Ringgold a réalisé sa série de peintures désormais iconique nommée en 1982. Plus de deux mille artistes ont ainsi bénéficié de cette résidence, pas seulement