Rock and Folk

The Electric Prunes

Grapefruit (Import Gibert Joseph)

Ils sont en général rangés — un peu hâtivement — au rayon garage américain (pléonasme). Mais si les Electric Prunes ont bien enregistré quelques morceaux dans le genre, ils étaient beaucoup plus variés que les habituels champions du genre, Standells, Count Five, Seeds, etc. En réalité, c’était un groupe de pop psychédélique qui avait commencé à jouer en 1965, délivrant les éternelles reprises de la british invasion. Leur chance Le disque fait un flop. Pour la suite, Hassinger commande une chanson à deux femmes songwriters qui travailleront longtemps avec le groupe, Annette Tucker et Nancie Mantz. Les deux jeunes femmes proposent “I Had Too Much To Dream (Last Night)”. La chanson commence comme “Summer Wine”, puis il y a des coups de tambourin à la manière de “Paint It, Black”, et le morceau décolle. Mais c’est le groupe et le traitement sonore qui envoient directement “I Had Too Much To Dream…” parmi les classiques de l’époque. De la guitare fuzz passée à l’envers, et tout le savoir-faire de Hassinger qui trouvera toujours aux Prunes des effets grandioses. Tucker et Mantz composent la quasi-totalité du premier album du groupe. Un disque très décousu réunissant novelties, pop baroque, ballades romantiques, un brin d’exotica et du psychédélisme. C’est ce qui fait son charme, mais on imagine les Prunes frustrés devant tant de variété à une époque, 1966, où leurs rivaux ont tous trouvé leur style. Une autre composition de Mantz, le légendaire “Take Me To The World On Time”, se retrouve à la vingt-septième places des charts (“Too Much To Dream” avait atteint la onzième), l’avenir est prometteur pour ces gens encore parfaitement inconnus quelques mois auparavant. Un deuxième album (un second, en fait, comme nous le verrons) est lancé. Cette fois, les Prunes souhaitent gagner en indépendance: Mantz et Tucker n’écriront que trois titres, le groupe se chargeant du reste. C’est “Underground”, petite merveille de rock psyché américain, avec des guitares fuzz dévalant des pentes orientalisantes noyées dans une reverb monstrueuse, le tout en beaucoup plus concis que ce qui se passe au même moment à San Francisco (Airplane, Dead, Quicksilver, etc.). La violence garage est encore présente (“Long Day’s Flight”), mais le psyché est bien là: nous sommes en 1967, les ballades du premier album sont oubliées, les Prunes s’amusent avec des morceaux comme “The Great Banana Hoax” ou “Children Of Rain”. Mais le single très étrange “Dr. Do-Good”, vraiment trop bizarre, n’intéresse personne, même si l’album se vend correctement et que les Californiens partent en tournée en Europe. Hélas, Hassinger est passé à autre chose, et commande au musicien légendaire David Axelrod (tellement samplé par les rappeurs pour ses disques des seventies) un nouveau projet. Axelrod compose une suite délirante de pseudo-chants grégoriens accompagnés d’instruments rock. Ce sera l’indigent “Mass In F Minor” dont on peut entendre un extrait, “Kyrie Eleison”, sur la BO d’ “Easy Rider”. Un groupe canadien, les Collectors, joue la partition, les Prunes ont leur nom sur la pochette mais n’ont rien fait, ou si peu. C’est la fin du groupe. Enfin, du vrai groupe. Deux autres albums des “Electric Prunes”, avec de nouveaux musiciens sortiront, l’un correct (“Release Of An Oath”), l’autre épouvantable (“Just Good Old Rock And Roll”). Ce superbe coffret regroupe tout cela: les deux albums originaux en mono et stéréo, la messe délirante pour hippies, les deux albums suivants enregistrés avec des imposteurs, un live radiant, des raretés et des démos. C’est sans doute beaucoup pour le quidam (la très bonne compilation “Too Much To Dream” est amplement suffisante), mais les dingues de musique sixties américaine n’hésiteront pas à se le procurer.

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