Adélaïde Lafarge et le maître de forges
Adélaïde était un peu désorientée. La dernière lettre de son fils Charles la laissait perplexe. C’était bien incroyable ce qu’il lui disait là.
Assise près de la fenêtre de sa chambre, elle contemplait à l’infini les prairies et les bois qui entouraient le château et son domaine – enfin, celui de Charles désormais. Adélaïde vivait maintenant chez son fils, dans cette demeure qui avait été la sienne, depuis le décès prématuré de son mari. Depuis ce jour où Charles avait hérité de son père, de son château, de son domaine, et de sa forge.
Charles avait dû faire face, remplacer son père, apprendre à diriger seul la forge et à devenir le maître. Heureusement, il travaillait depuis longtemps avec lui, depuis ses treize ans. Il avait eu le temps d’étudier, et de s’exercer aux différentes étapes de la fonte et de la transformation du minerai en fer. La forge n’avait pour lui aucun secret et il avait de nombreux ouvriers. Toutefois il devenait urgent et indispensable de trouver un contremaître capable de le seconder. D’autant que ses affaires l’appelaient à Paris plusieurs mois par an. Une trop longue période pour laisser la forge fonctionner sans le contrôle d’un homme de confiance.
Chaque printemps le ramenait donc dans cette capitale si éloignée de son domaine. Un voyage bien long: trois jours étaient nécessaires. Il partait à cheval, sur les sentiers et les chemins creux, jusqu’à Uzerche. C’était quasiment le seul moyen pour rallier cette ville, puis il continuait en malle-poste. Ce voyage était pour lui l’occasion de quelques visites à plusieurs membres de la famille qui avaient le bon goût de demeurer dans des sites stratégiques, ce qui lui permettait de faire des pauses bienvenues sous prétexte de visites de courtoisie.
Adélaïde le chargeait toujours de quelques missives et de petits présents. Partout il était bien reçu. Comme l’avait été, pendant des années, son père.
Elle ne pouvait s’empêcher de trembler à chacun de ses séjours dans une capitale aussi séduisante et dangereuse que certaines
