Spécial Cannes
L’ÉVÈNEMENT Benedetta
e-ne-de-tta. On peut répéter, épeler dix fois son nom : Benedetta restera un mystère. De même, on peut survoler la biographie de cette célèbre religieuse lesbienne du xvii siècle, comprendre le scandale que fut sa vie – sacrifier sa foi à une passion charnelle, jusqu’à mêler les deux –, on ne décodera pas l’énigme de cette féminitéIsabelle Huppert dans Impossible de savoir ce que sœur Benedetta pense, et la caméra du réalisateur néerlandais, longtemps exilé à Hollywood avant de nous faire l’honneur de deux films en France, ne peut que tournoyer aveuglément autour d’elle. Une caméra fascinée, aimantée. Car Virginie Efira est sublime dans sa violence illuminée. Elle exhibe sur son corps stigmates et blessures, se dit devient lui. Scènes de rêve où l’image ne craint pas le kitsch : elle s’y vautre à grands coups de pâte colorée avec un Jésus sexy comme un chanteur de boys band. On rit presque – rompu au second degré de l’auteur qui a si finement parodié le grand spectacle viriliste américain, de à et On rit, oui, mais sans se moquer. Car le film ne badine pas quand il s’abreuve à ses deux sources sacrées: le sexe et la violence. La force transgressive. Ce point où le réel bascule, où l’interdit est bafoué, voilà où Benedetta s’emballe, s’embrase, délivre sa puissance de feu. Une statuette de la Vierge détournée en godemichet. Une scène d’extase charnelle. Un sein dévoré par l’automutilation. Une voix monstrueuse échappée de Un suicide en haut d’un clocher comme une citation de Une météorite dans le ciel rouge. L’œil vengeur et exorbité d’une Charlotte Rampling impériale. Alors oui, ça fait beaucoup de corps féminins suppliciés. Trop, peut-être. Mais super-héroïnes invincibles, elles le sont aussi. Alors quand Verhoeven, 82 ans, avoue dans une ancienne interview à que on le croit.
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