Au bout du fleuve Congo
Descendre le fleuve Congo. Comme Charles Marlow à la recherche de Kurtz, personnage clé du roman de Joseph Conrad . Patrick de Saint-Exupéry est a renoué avec le terrain et s’est lancé dans une enquête fouillée sur ce que l’on qualifia de second génocide. En 1994, 800 000 Tutsis sont massacrés par les Hutus au Rwanda. En fuite, ces derniers se réfugient chez le voisin, qui s’appelle encore le Zaïre. Une autre histoire commence. Leur extermination par des victimes ivres de revanche et qui seraient allées les chercher jusque dans leurs camps de fortune, les poussant à fuir de nouveau et à s’enfoncer dans les ténèbres de ce qui deviendra la République démocratique du Congo. L’auteur n’a jamais caché qu’il rendait la France complice de cette tragédie. Mais la beauté du livre n’est pas tant la quête de la vérité que la manière dont il la conduit. On avance avec lui, on prend le bus, le bateau, on s’enfonce dans la jungle, et surtout on tâtonne. Le reportage n’est pas une autoroute balisée, il est jalonné de chausse-trapes et de rencontres magiques. Comme celle d’Ildephonse et de son histoire hallucinante à propos de Juvénal Habyarimana, le président rwandais tué dans l’attentat visant son avion. Le cadavre sera sorti de son mausolée par Mobutu pour être envoyé à Kinshasa, le corps finira brûlé le 15 mai 1997. Au bord du fleuve Congo.
