Sonate à quatre mains
De plus en plus souvent, Ioulia et Dimitri revenaient ensemble de l’école de musique. Elle apprenait le violon, lui, le piano.
Leurs parents habitaient le même quartier d’Oulianovsk, une ville située sur les rives de la Volga. Ils fréquentaient la même école depuis leur enfance, mais c’était leur amour commun pour la musique classique qui les avait rapprochés. Les préludes de Scriabine et les romances de Glinka, pas plus que les sonates de Chopin, n’intéressaient leurs camarades de classe et cette différence, souvent moquée, les avait soudés face au mépris général.
Les parents de Ioulia, qui étaient eux-mêmes d’une famille de musiciens, avaient inscrit leur fille très tôt dans la classe de violon de l’école de musique d’Oulianovsk. Ioulia aurait préféré le piano, mais il ne lui serait pas venu à l’idée de désobéir à sa mère. Elle se rattrapait en jouant en cachette sur l’instrument de Dimitri qui possédait un vieux piano, pas très bien accordé. Son parrain, mort d’avoir trop fait la fête dans les cabarets où il se produisait, le lui avait légué.
Dimitri était doué. Il rêvait de suivre les traces de cet oncle Vlad, aventurier et merveilleux conteur, malgré ce qu’on disait de lui et qu’il ne croyait qu’à moitié.
Il lui avait fallu insister auprès de ses parents pour réussir à prendre des cours, lui aussi, à l’école de musique.
Les Gouriev ne roulaient pas sur l’or, loin de là. Avec un salaire de chauffeur de bus et un autre d’employée de supermarché, ils ne voyaient dans ces cours de musique que du temps et de l’argent perdus.
– Tu n’en auras pas besoin quand tu seras employé municipal. J’ai déjà parlé de toi à l’adjoint, tu as une place toute chaude.
Et sa mère renchérissait :
– Regarde où ses fantaisies musicales ont conduit ton malheureux parrain. Si Vlad avait suivi le conseil de son père, il serait toujours
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