Mank DE DAVID FINCHER
avid Fincher est un génie. Pour “Seven”, bien sûr, “le” le plus traumatique de l’histoire du cinéma. Mais aussi “Fight Club”, satire au goût de fin de race, “Panic Room”, exercice de style vertigineux tourné en huis clos ou encore “The Social Network” sur la création de Facebook. Même “Alien 3”, son premier long-métrage — et pas son meilleur — est bien plus classe et tordu que n’importe quelle épopée, et montre dans le moindre détail scrutateur la confrontation permanente entre ceux qui imaginent les films et les patrons des studios, toujours promptes à les faire réécrire dans un sens plus simpliste. Une intention évidemment louable, qui permet probablement à Fincher d’exorciser les mauvais souvenirs de ses débuts, quand son “Alien 3” fut remonté dans son dos par les boss de la Fox. “Mank” a donc le look d’un film à l’ancienne, tourné en noir et blanc façon “Citizen Kane” (la photo d’Erik Messerschmidt est magnifique) avec un sens du détail hallucinant (les années 1930/ 1940) et une interprétation au cordeau (dans le rôle de Mankiewicz, Gary Oldman est, comme d’habitude, habité). Seulement — et c’est là où le film devient un demi-film du mois — il y a un souci de taille: “Mank” est… ennuyeux! Certes bardé de références classes à un Hollywood disparu, mais qui larguera une majorité de spectateurs de Netflix non cinéphiles. D’où les adjectifs un peu ambigus qu’on a pu lire ici et là sur la complexité du récit, sur la surabondance des dialogues ou sur une surdose de flash-back quelque peu bordélique. “Mank” agit donc en deux temps. Le premier, élégant, a le look d’un vrai film de cinéma comme on n’en fait plus. Le second, plus dommageable, fait refermer le film sur lui-même dans une complexité étouffante qui ne provoque finalement ni compassion particulière pour les personnages, ni passion sincère pour l’intrigue. Ce qui n’empêchera pas “Mank” d’obtenir peut-être une brassée d’Oscars en avril prochain. Probablement mérités, certes, mais un peu par défaut quand même …
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