LES STUDIOS, L’ÉPOPÉE!
Brian Wilson réussira ce rêve impossible de Spector
NOUS SOMMES EN 1958. CELA COMMENCE PAR LES QUATRE ACCORDS MAGIQUES. RÉ LA 7, SI mineur SOL… La chanson s’installe. Et puis soudain, ça module en FA. Alors que nous sommes en RE? Pour l’époque, en matière de pop, c’est quelque peu incongru, ou osé. En musique classique, on aurait appelé ça dominante secondaire, évoqué la sixte napolitaine. Rien que ça. Façon Purcell. Mais ce “Why can’t he see, how blind can he be” susurré et imprévu qui arrive alors vous emmène… dans un ailleurs frissonnant. “To Know Him Is To Love Him”. Les Beatles n’oublieront jamais la leçon.
Il n’a que dix-neuf ans, s’appelle encore Harvey Philip Spector, est amoureux d’Annette, la chanteuse qui n’aime que les footballeurs baraqués (le troisième larron des Teddy Bears), a composé le truc, joue guitare, piano, basse et percussion, et a conçu le son fantomatique de l’affaire. Pour la première fois, les timbres… Tout juste comme dans “To Know Him Is To Love Him”, justement: grâce au studio, le résultat final peut être plus grand que la somme de ses parties. Et il en vend des millions. Phil Spector est né. Petit Juif russe du Bronx, émigré en Californie. Le succès de “To Know Him Is To Love Him” lui permet — fort vite — d’entrer en studio. Son bunker, sa crypte, son château hanté. Avec ses lunettes et son look de dandy dylanien, il invente le concept de maître des horloges, de producteur fou. Thomas Mann et son Docteur Faustus adapté au rock. De tout, il sera l’organisateur secret, le démiurge.
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