CORPS--CORPS AVEC LA MORT
« Tous les jours, on passe de justesse », disent-ils. Du professeur à l’infirmière et l’aide-soignante, c’est pour chacun le même sentiment d’une course de haies sans fin. Et lorsque la mort est au rendez-vous, peu de temps pour le chagrin. Car il faut regarder vers ceux qu’on doit sauver. Ici, en trente-cinq jours, les médecins n’ont pas pris une seule journée de congé. « On réussit des choses qu’on n’aurait jamais imaginées faire », s’étonne le Pr Jean-Marie Danion, président de la Commission médicale d’établissement de Strasbourg. Aujourd’hui, le nombre des patients Covid en réanimation dans la région Grand-Est commence enfin à baisser, mais c’est à un nouveau déferlement qu’il faut s’attendre : celui de toutes les opérations trop longtemps repoussées, au nom de l’urgence dans les urgences.
PENDANT UNE SEMAINE, NOS REPORTERS ONT ASSISTÉ AU COMBAT ÉPUISANT DES INFIRMIÈRES ET DES MÉDECINS DANS LES SERVICES DE RÉANIMATION DE DEUX HÔPITAUX STRASBOURGEOIS
Régulièrement, les patients mis sous coma artificiel doivent être retournés pour améliorer l’oxygénation et éviter les escarres. Une manipulation qui nécessite la parfaite coordination de cinq soignants et des trésors d’ingéniosité, car les malades intubés, branchés à ce que médecins et infirmières appellent les « lignes de vie », sont à la merci d’une maladresse. Jour après jour, le personnel soignant répète, innove pour pallier le manque et applique les leçons de tant d’expériences nouvelles. Depuis le 4 mars, les sept CHU strasbourgeois sont passés de 80 à 210 lits de réanimation. Confinement oblige, l’étau se desserre. Mais dans la lutte contre la mort, la pression ne se relâche pas.
POUR QUE LA VIE NE BASCULE PAS, IL FAUT FAIRE ÉQUIPE JOUR ET NUIT
FACE À LA SOUFFRANCE, DES HÉROÏNES ANONYMES MULTIPLIENT LES GESTES QUI APAISENT
DIMANCHE
Quand, aux premiers jours de mars, le Covid-19 s’est installé à Strasbourg, l’infirmière Annick Carpanen, mère d’une petite fille de 5 mois, a envoyé balader lumbago et arrêt de travail pour reprendre sa place dans le planning du Nouvel Hôpital civil (NHC).
