Une autre Amérique
’ST LA MÊME HISTOIRE TRISTE qui se répète encore et encore”, chante Springsteen dans “The Wayfarer”, probablement l’une des meilleures compositions de son nouvel album. On ne peut d’ailleurs réellement saisir toute la portée de son propos qu’en écoutant les textes de Western Stars. Car si le son de ce disque le distingue immédiatement de ses précédents projets en solo, ce sont bien les mots qui font ici le lien avec le reste de son oeuvre. Les mêmes histoires, encore et toujours… les mêmes êtres humains bousculés par la vie… les mêmes destins chavirés, brisés. Peu importe l’époque, il existe une certaine intemporalité dans le malheur des hommes. Comme c’était déjà le cas dans Nebraska ou dans The Ghost of Tom Joad, le son.writer Springsteen déroule une série de récits sombres, de portraits comme tracés par le plus fin des pinceaux, brosse des paysages qui ramènent à toute une imagerie littéraire et cinématographique. Lorsqu’on replonge dans ces deux albums aussi intenses qu’épurés, on se rend compte à quel point les flics et les criminels de Nebraska (1982) sapaient le triomphalisme insolent de l’Amérique des winners de Ronald Reagan… là où les clandestins, les sans-abris et les drogués de Tom Joad (1995) la trouvaient exsangue, au bout du rouleau…
, lui aussi, est peuplé de personnages charriant leur lot d’histoires, de blessures, de coups tordus du destin. Tous se sont heurtés à une implacable réalité et semblent n’avoir d’autre choix que de raconter, humblement, simplement, comment ils en sont arrivés là.: un seul point commun entre eux, la rédemption et la résilience. Ainsi peut-on être tenté de lire en creux dans cet album une sorte réponse aux fanfaronnades de Donald Trump
