SVHS : Les émotions ont d’abord été un sujet de réflexion philosophique. Quand cela a-t-il changé ?
Bernard Rimé : En 1890, William James publie The Principles of Psychology, qui est considéré comme le premier traité de psychologie générale.
Il y parle d’émotions et leur ouvre ainsi la porte à une étude par la psychologie. Mais dans les années 1910, aux États‑Unis également, John Watson et d’autres développent le comportementalisme (behaviorism, en anglais), qui affirme que les processus mentaux sont, si ce n’est inexistants, inaccessibles à l’étude scientifique. Dans ce cadre, Watson explique que les émotions sont des phénomènes subjectifs extrêmement variables et sans intérêt et les renvoie à la physiologie. Et, effectivement, les physiologistes s’en empareront. Notamment à travers la figure de Walter Cannon, grand physiologiste des émotions, qui a mis en évidence le rôle du système nerveux autonome, les réponses physiologiques d’urgence, les mécanismes d’attaque et de fuite… Le comportementalisme avait tellement d’emprise que, d’un point de vue de la psychologie, les émotions ont été totalement négligées.
Encore avant William James, en 1872, Charles Darwin avait publié un livre qui traite des émotions, . Cet ouvrage sur