Ilya une quinzaine d’années, Astrid et son mari Gilles remarquent ce hangar à bateaux et décident de l’acheter, avec sa maison attenante. Ils entreprennent alors sa transformation en atelier d’artiste, veillant à préserver les verrières d’origine tout en aménageant l’espace intérieur. De cet écrin de verdure, où quelques pas suffisent pour aller se promener le long des rives de la », explique-t-elle. Après avoir exploré toutes les méthodes traditionnelles, elle découvre la technique de la gravure au carborundum grâce à l’imprimeur suisse Raymond Meyer. Elle la décrit comme étant similaire à de la peinture imprimée, plus rapide et spontanée. Cette technique lui permet une gestuelle semblable à celle des artistes asiatiques avec leurs gros pinceaux encrés. Elle la pratique sur des séries limitées de grands formats ou en monotype. Côté inspiration, Astrid ressent la nécessité d’être en lien avec la nature pour nourrir son processus créatif. Elle transpose cette connexion dans ses aquarelles et ses encres, capturant les motifs sur le vif. En attestent ses travaux lors de ses nombreuses résidences d’artistes, en France comme à l’étranger (Fondation des Treilles, Institut français de Tanger et de Tétouan au Maroc, Villa Médicis en Italie, ainsi que l’Irlande, le Japon et la Tasmanie), qu’elle alterne avec son travail à l’atelier. Elle crée pour cela des plaques inspirées de ses dessins. Elle envisage sa démarche artistique comme une expression vivante, spontanée, imprévisible. « », souligne-t-elle. De même que « ». Diplômée de l’École supérieure d’arts graphiques, à Paris, elle a ensuite intégré l’équipe de décor du théâtre des Amandiers, sous la direction de Richard Peduzzi et de Patrice Chéreau. Par la suite, elle collaborera, comme illustratrice, avec plusieurs médias et deviendra dessinatrice judiciaire pour la télévision, couvrant des procès politiques et d’assises. Plus tard, devenue artiste à part entière, elle enseignera quatre ans à l’École nationale supérieure d’architecture de Paris-Belleville. En 2016, elle est la première femme élue à l’Académie des beaux-arts de l’Institut de France en section gravure. Après avoir exposé ses œuvres en Suisse, en Allemagne et à Paris, Astrid trouve refuge et inspiration dans son atelier, où elle conjugue intimité avec une chambre à l’étage et un petit salon tapissé de kilims chinés. L’espace est empreint de ses œuvres, des souvenirs et des objets qu’elle a accumulés. La lumière naturelle entre à flots par l’immense verrière. Le jardin est partie prenante de ce lieu de création qui se compose d’une table de dessin parsemée de nombreuses encres, d’un bureau encombré de piles de livres et de lettres, alors que le mur, lui, est tapissé de photos, dessins, gravures, portraits d’amis et de famille. Au fond de la pièce trône la presse à imprimer, entourée de pièces de tarlatane (un tissu très utilisé en gravure qui ressemble au tulle) qui sèchent et de boîtes en bois renfermant archives et œuvres exposées. Aquatintes, gravures, souvenirs de résidences, œuvres exposées au fil du temps appartiennent à un cheminement créatif. Astrid envisage un nouveau projet au Japon, sur l’île de Yakushima, réputée pour sa beauté naturelle. Fidèle à elle-même, elle confectionnera ses propres carnets de dessins, où, portée par sa curiosité, elle saisira les nuances de paysages inconnus avant de les retranscrire sur papier à travers de singulières gravures dont elle préserve le secret. En attendant, ses œuvres se consultent dans son dernier livre, , où elles dialoguent avec les textes de Florian Rodari. Un ouvrage poétique, édité par Snoeck, qui retranscrit toute l’intensité de sa vision du monde.
