Alors qu’une grande partie de la population masculine est morte dans les combats ou exilée, les femmes prennent le relais
Elles assument tous les métiers, noient leur tristesse dans la chicha et espèrent trouver l’amour sur les réseaux sociaux
De notre envoyée spéciale en Syrie Florence Broizat
Sous le soleil, les ruines ne sont pas moins laides mais l’air est plus doux. Zahar savoure la promesse de printemps qui flotte en ce matin de février à Homs. Cette veuve de 70 ans est née huit ans après la fin du mandat français. Elle a vu défiler les régimes autoritaires, arriver El-Assad père, lui succéder son fils, elle a assisté à l’embrasement du pays, a connu les bombardements, la faim, la peur, les fils tombés pour la patrie, le sol qui a tremblé si fort l’hiver 2023 et puis par-dessus tout, comme un brouillard opaque, cette misère qui asphyxie chaque jour un peu plus le peuple et ronge l’espoir. L’année dernière, le prix des médicaments a explosé de 150 %, 1 dollar équivaut désormais à 14 100 livres syriennes, contre 1 000 il y a quatre ans. Dans les quartiers les plus pauvres, rationnés à trente minutes d’électricité quotidiennes, faire une lessive peut prendre quatre jours. Écrasée par les pénuries, la Syrie est devenue « le pays de la file d’attente ». Pour l’essence, le pain, le salaire des fonctionnaires… Zahar maugrée. « Nous étions heureux avant, tout a changé. Et nos filles, les pauvres ! Elles ne peuvent plus choisir leur mari, il n’y a plus d’hommes ! Elles doivent se contenter de ceux qui restent, qui