LE TROU NOIR QUI TOURNE À L’EXTRÊME
Difficile d’imaginer plus incroyable encore qu’un trou noir, cet astre si massif qu’il piège toute matière et lumière franchissant son horizon des événements, et doté en son centre de cette porte vers l’inconnu d’où rien ne peut revenir. Et pourtant… ils virevoltent aussi sur eux-mêmes, générant dans leurs alentours une bulle d’espace-temps appelée “ergosphère”, qui entraîne toute particule s’y égarant dans cette même danse folle. Ce n’est pas fini : parmi ces trous noirs dits “de Kerr”, il en existerait des plus fous encore, qui auraient atteint la vitesse de rotation maximale autorisée par leur masse. Ce sont les trous noirs de Kerr extrémaux, et leurs abords pourraient tracer la voie à un tout nouveau pan de la physique.
Les trous noirs de Kerr extrémaux n’ont jamais été observés : ce sont des astres purement théoriques dont l’existence est permise par la Relativité générale d’Einstein. Or cette théorie classique de l’espace et du temps ne prend pas en compte les lois de la mécanique quantique qui règnent aux petites échelles, sauf par le biais de tentatives de corrections développées au cours du temps. Justement, le physicien Gary Horowitz, de l’université de Californie, aux États-Unis, et ses collaborateurs ont récemment appliqué plusieurs de ces retouches quantiques à la physique des trous noirs de Kerr extrémaux, afin d’en explorer les propriétés.
D’une part, les chercheurs ont pris en compte le fait que des particules tels des électrons ou des neutrinos naîtraient brièvement du vide, comme l’autorise la mécanique quantique. D’autre part, ils ont considéré l’existence de potentielles particules très massives encore jamais observées. “La plupart du temps, ces corrections sont négligeables, précise Gary Horowitz. Mais leurs répercussions sur les trous noirs extrémaux sont en fait colossales.”
LA MATIÈRE ÉTIRÉE À L’INFINI
C’est peu de le dire : dans cette Relativité générale revisitée, ces monstres cosmiques généreraient autour d’eux des forces de marée inédites. Près d’un trou noir classique, ces dernières sont responsables du phénomène de “spaghettification” : l’espace-temps est tellement courbé que l’attraction gravitationnelle change drastiquement en différents points d’un même objet. Si l’on y plongeait les pieds devant, on s’étirerait alors à l’infini… comme un spaghetti.
Or, aux abords d’un trou noir de Kerr extrémal, ces forces de marées seraient elles-mêmes infinies ! Ceci car , précise le physicien. Un phénomène qui pourrait aider les chercheurs à débusquer une nouvelle physique : une unification possible entre la Relativité générale et la mécanique quantique – quasiment une théorie du tout ! Comment ? L’idée est simple :